Économie mondiale

Rapport sur la politique monétaire – Octobre 2025

La croissance mondiale a été résiliente. Mais la hausse historique des droits de douane américains remodèle le commerce international, pèse sur les perspectives de croissance mondiale et fait monter l’inflation aux États-Unis.

La politique commerciale américaine s’est transformée depuis janvier, ce qui provoque une réorganisation du commerce mondial. Le taux moyen des droits de douane imposés par les États-Unis est passé d’un peu plus de 2 % au début de 2025 à 17 % – le taux le plus élevé en plus de 80 ans (graphique 25).


De nouveaux droits de douane continuent d’être annoncés, et viennent s’ajouter aux accords commerciaux existants avec les États-Unis. Bien que l’incertitude entourant la politique commerciale américaine demeure élevée, elle s’est atténuée par rapport à son sommet atteint plus tôt en 2025 (graphique 26). Parallèlement, les mesures de rétorsion ont été très modestes.


Les conséquences de la politique commerciale américaine se font sentir de nombreuses façons, notamment :

  • les exportateurs redirigent les biens pour éviter les droits de douane
  • les droits de douane et l’incertitude pèsent sur les décisions d’investissement dans de nombreux pays et entraînent une réaffectation du capital et du travail
  • les droits de douane sont une source importante de pression inflationniste aux États-Unis et font augmenter les coûts dans les chaînes d’approvisionnement mondiales

L’économie mondiale a bien résisté à ce changement structurel dans la première moitié de 2025. En effet, la croissance s’est située juste au-dessus de 3 %, soutenue par le devancement des activités avant l’imposition des droits de douane et la robustesse de la demande intérieure en Chine, dans la zone euro et aux États-Unis.

Mais la croissance montre maintenant des signes de ralentissement. On s’attend désormais à ce que la croissance mondiale se situe en moyenne à 2½ % dans la deuxième moitié de 2025. Elle devrait ensuite se raffermir pour avoisiner 3 % en 2026 et 2027.

Toutefois, la réorganisation du commerce international et la réaffectation du capital et du travail dans les secteurs les plus touchés par le conflit commercial devraient placer l’économie mondiale sur une trajectoire plus basse.

Les perspectives de croissance du produit intérieur brut (PIB) mondial, et américain en particulier, sont plus faibles qu’anticipé dans le Rapport de janvier, le dernier à inclure un scénario de référence.

États-Unis

Aux États-Unis, la croissance économique est demeurée forte malgré l’imposition de droits de douane et la hausse de l’incertitude. Toutefois, récemment, la progression de l’emploi s’est essoufflée et les investissements non liés à l’essor de l’intelligence artificielle (IA) ont faibli. Les droits de douane ont également commencé à faire monter les prix à la consommation1.

L’activité économique est vigoureuse, mais la croissance de l’emploi ralentit

Après avoir rebondi pour atteindre 3,8 % au deuxième trimestre de 2025, la croissance économique américaine devrait s’établir en moyenne à 2,5 % dans la seconde moitié de l’année.

  • La croissance des dépenses de consommation, en particulier chez les personnes à revenu élevé, devrait rester solide en raison des gains récents sur les marchés boursiers et de la croissance du revenu réel. Cette vigueur devrait plus que compenser les effets des hausses de prix liées aux droits de douane, de l’incertitude économique et de la réduction de l’immigration.
  • La croissance des investissements des entreprises a été forte, stimulée par les dépenses liées à l’IA. L’incertitude entourant les politiques a freiné les dépenses d’investissement dans d’autres domaines.
  • La paralysie partielle du gouvernement pèsera temporairement sur les dépenses publiques.
  • Les flux commerciaux des États-Unis devraient être stables tout au long de la deuxième moitié de 2025, après avoir été volatils plus tôt dans l’année. La croissance des exportations devrait être modeste, tandis que la hausse des droits de douane américains devrait limiter considérablement la croissance des importations. Depuis le début de 2025, les importations en provenance de la Chine, du Canada et de la zone euro ont diminué (graphique 27).

La croissance de l’emploi aux États-Unis a nettement ralenti, bien que le taux de chômage soit demeuré relativement stable (graphique 28). Le repli de l’emploi dans le secteur manufacturier a partiellement contrebalancé les gains dans le secteur des soins de santé. En même temps, la réduction des niveaux d’immigration a entraîné un ralentissement de la croissance de l’offre de main-d’œuvre.


Les droits de douane ont fait augmenter l’inflation fondamentale

L’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation a progressé principalement parce que les entreprises ont répercuté une partie des coûts liés aux hausses de droits de douane sur les consommateurs (graphique 29). La proportion de ces coûts transmis aux consommateurs par les entreprises augmentera vraisemblablement au cours des prochains trimestres.

  • L’inflation fondamentale mesurée à partir de l’indice des prix à la consommation est montée à 3,1 % au troisième trimestre de 2025, contre 2,8 % au deuxième trimestre, en grande partie à cause de l’effet des droits de douane sur les prix des biens.  
    • Les droits de douane imposés plus tôt cette année ont entraîné des hausses des prix de nombreuses sous-composantes de l’indice des prix à la consommation, comme les ustensiles de cuisine, les véhicules automobiles et leurs pièces, les meubles, les électroménagers, les outils et le matériel.
    • On suppose que, en septembre, environ la moitié de la répercussion des coûts liés aux droits de douane sur les prix aurait déjà eu lieu.
  • L’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation dans le secteur des services est restée forte.

Les attentes d’inflation demeurent élevées chez les fabricants, les entreprises du secteur des services et les ménages.


La croissance devrait se modérer

La croissance du PIB devrait ralentir en 2026 par rapport au fort rythme affiché pendant la deuxième moitié de 2025, freinée par l’incertitude entourant les politiques et par les droits de douane plus élevés. Les taux d’intérêt plus bas devraient toutefois soutenir les dépenses des ménages.

Dans l’ensemble, on s’attend à ce que la croissance demeure près de 2 % aux États-Unis durant la période de projection (graphique 30). Le niveau d’activité projeté est plus bas que prévu en janvier en raison des mesures commerciales américaines, de l’incertitude au sujet des politiques et de la réduction de l’immigration. Les robustes dépenses liées à l’IA et la productivité du travail ont contribué à la croissance.

  • La croissance des investissements des entreprises devrait se modérer en 2026, le rythme de progression des dépenses liées à l’IA ralentissant. On s’attend à ce que d’autres secteurs d’investissement se redressent à mesure que l’incidence de l’incertitude entourant les politiques s’estompera et que les nouvelles règles sur l’amortissement prévues dans la loi « One Big Beautiful Bill » entreront en vigueur.
  • Les droits de douane quasi unilatéraux devraient entraîner de modestes améliorations de la balance commerciale, la production intérieure remplaçant les biens importés2.

La croissance des dépenses des ménages devrait augmenter plus tard dans la période de projection, à mesure que l’incidence de l’incertitude se dissipera. On s’attend à ce que la croissance plus lente des dépenses publiques et des exportations contrebalance une partie de cette augmentation.

L’inflation mesurée par l’indice de prix relatif aux dépenses de consommation des ménages (PCE), la mesure privilégiée par la Réserve fédérale, devrait ralentir graduellement pour se rapprocher de 2½ % d’ici la fin de 2026, puis s’établir plus près de 2 % en 2027. Ce ralentissement reflète à la fois l’atténuation des effets des droits de douane et la baisse des attentes d’inflation par rapport à des niveaux encore élevés.


Zone euro

Après s’être établie à environ 1,5 % dans la première moitié de 2025, la croissance dans la zone euro a ralenti en raison de la faiblesse persistante des exportations et de la progression plus lente de la demande intérieure. L’inflation est restée près de 2 %.

  • Après un net recul au deuxième trimestre, les exportations devraient encore baisser durant la seconde moitié de 2025 en raison de la hausse des droits de douane américains et des problèmes de compétitivité, y compris la récente appréciation de l’euro.
  • La croissance de la demande intérieure, qui a été résiliente, devrait se modérer.
  • L’incertitude entourant les politiques freine la progression des investissements des entreprises.

Plus loin dans la période de projection, la croissance devrait se redresser en raison :

  • de l’atténuation des effets des droits de douane et de l’incertitude qui en découle
  • des dépenses publiques supplémentaires dans la défense et les infrastructures

Globalement, la Banque s’attend à ce que le PIB de la zone euro progresse de 1¼ % en moyenne au cours de la période de projection. L’inflation devrait rester proche de la cible de 2 % de la Banque centrale européenne.

Chine

La croissance économique a été solide en Chine durant les trois premiers trimestres de 2025, stimulée par les robustes mesures publiques de soutien aux ménages. Le pays a rapidement réorienté ses exportations des États-Unis vers d’autres marchés, ce qui a atténué les pertes d’exportation liées à la hausse des droits de douane américains (graphique 31).

La croissance devrait ralentir au quatrième trimestre de 2025 (graphique 32) en raison de ce qui suit :

  • la diminution progressive du soutien budgétaire aux ménages
  • la directive du gouvernement visant à réduire les investissements inefficients3
  • la baisse de l’activité dans le secteur immobilier
  • le ralentissement de la croissance de la production industrielle

La croissance du PIB en Chine devrait ralentir, et passer d’environ 5 % en 2025 à 4¼ % en moyenne en 2026 et en 2027. Ce ralentissement est dû au vieillissement de la population, qui réduira la taille de la population active, et à un rythme plus lent d’accumulation du capital.

  • Les droits de douane américains et les nouvelles politiques visant à freiner les capacités excédentaires, qui sont en hausse, signifient que les exportations et les investissements devraient contribuer moins à la croissance qu’ils ne l’ont fait ces dernières années.
  • Ce ralentissement devrait être partiellement compensé par une croissance plus forte de la demande intérieure attribuable à une hausse des dépenses de consommation. La croissance de ces dépenses devrait augmenter à mesure que le gouvernement mettra en place de nouvelles initiatives de relance et que les prix de l’immobilier se stabiliseront.

  1. 1. Outre l’indice des prix à la consommation de septembre publié le 24 octobre, aucune statistique officielle n’a été publiée aux États-Unis depuis le 30 septembre, en raison de la paralysie partielle du gouvernement au début du mois d’octobre.[]
  2. 2. Les droits de douane sont considérés comme quasi unilatéraux, parce que le taux effectif des droits de douane sur les exportations américaines vers le reste du monde n’a augmenté que de 1 point de pourcentage, tandis que le taux imposé sur les importations américaines en provenance du reste du monde a grimpé d’environ 14 points de pourcentage.[]
  3. 3. Cette directive s’inscrit dans la campagne « anti-involution » menée par le gouvernement chinois, qui vise à limiter la guerre de prix que se livrent les producteurs nationaux et à réduire la production inefficiente. La campagne a pour objectif de rendre les investissements plus efficients, d’améliorer la rentabilité des entreprises et leur pouvoir d’établir leurs prix, et, en définitive, de contrer les pressions déflationnistes dans l’économie.[]

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