Le résumé qui suit rend compte des délibérations du Conseil de direction de la Banque du Canada ayant mené à la  décision de politique monétaire annoncée le 17 septembre 2025.

Il reflète les discussions et les délibérations qu’ont tenues les membres du Conseil de direction à la troisième étape du processus entourant les décisions de politique monétaire, soit après avoir reçu toutes les informations et recommandations pertinentes du personnel.

Les réunions concernées, présidées par le gouverneur Tiff Macklem, ont débuté le 12 septembre 2025. La première sous-gouverneure Carolyn Rogers, le sous-gouverneur Toni Gravelle, la sous-gouverneure Sharon Kozicki, le sous-gouverneur Nicolas Vincent, et la sous-gouverneure Michelle Alexopoulos y ont participé. Le sous-gouverneur Rhys Mendes n’était pas présent.

Économie internationale

Les membres du Conseil ont ouvert leurs délibérations en discutant de l’évolution de l’économie mondiale depuis la parution du Rapport sur la politique monétaire de juillet. Même si l’économie mondiale s’était révélée résiliente face à la hausse des droits de douane américains dans la première moitié de l’année, il y avait de plus en plus de signes que la croissance économique ralentissait.

Aux États-Unis, la vigueur des dépenses de consommation semblait s’être modérée, et le marché du travail s’était assoupli. La croissance mensuelle des emplois non agricoles avait ralenti récemment, et les révisions apportées aux données laissaient supposer que les embauches avaient été moins nombreuses au cours de la dernière année. Le ralentissement de la croissance démographique avait pesé sur la consommation, et cela allait vraisemblablement se poursuivre. Les membres ont noté que la baisse des dépenses de consommation aux États-Unis allait se traduire par une demande plus faible de produits canadiens.

La croissance américaine était stimulée par la vigueur continue des investissements des entreprises, attribuable en grande partie aux investissements dans les centres de données pour l’intelligence artificielle (IA). Il était attendu que ces investissements entraînent des gains de productivité dans l’ensemble de l’économie américaine, ce qui allait favoriser une croissance continue. Toutefois, si la confiance à l’égard du rendement des investissements dans l’IA devait s’affaiblir, il était possible que leur contribution importante récente à la croissance ne se poursuive pas.

L’inflation restait relativement élevée aux États-Unis, et il y avait de plus en plus de signes que les droits de douane étaient répercutés en partie sur les prix à la consommation.

Dans la zone euro, la croissance s’était modérée, les droits de douane américains nuisant au commerce. L’économie chinoise avait ralenti au deuxième trimestre. Les exportations avaient résisté mieux que prévu malgré une baisse marquée des expéditions vers les États-Unis au cours des mois précédents. Les membres ont noté la baisse importante des investissements en capital fixe observée récemment en Chine et l’incertitude entourant la persistance de cette faiblesse.

Les conditions financières s’étaient assouplies depuis la parution du Rapport de juillet, les prix des actions ayant augmenté, les écarts de crédit étant restés stables et les rendements obligataires ayant diminué. Le dollar américain s’était déprécié par rapport à la plupart des devises, mais le taux de change Canada–États-Unis était resté relativement stable depuis juillet. Les prix mondiaux du pétrole étaient près des niveaux postulés dans le Rapport de juillet.

Économie canadienne et perspectives d’inflation au pays

Les membres ont ensuite porté leur attention sur l’évolution récente de l’économie canadienne depuis la parution du Rapport de juillet.

Les droits de douane et l’incertitude commerciale continuaient de peser sur l’économie, qui s’était contractée comme prévu au deuxième trimestre. Les exportations avaient chuté de 27 % après avoir été devancées par les entreprises au premier trimestre pour éviter les droits de douane. La croissance des investissements des entreprises avait aussi été négative au deuxième trimestre. Celles-ci indiquaient avoir adopté une approche attentiste, compte tenu de l’imprévisibilité de la politique commerciale américaine.

En revanche, les dépenses des ménages avaient été plus élevées qu’attendu au deuxième trimestre. La croissance de la consommation globale et par habitant avait été robuste et généralisée. L’activité de revente et les mises en chantier de logements avaient augmenté dans l’ensemble par rapport à leurs bas niveaux, malgré d’importantes disparités régionales. Le Conseil s’est demandé dans quelle mesure le ralentissement de l’expansion démographique et l’assouplissement du marché du travail pourraient freiner la progression des dépenses des ménages dans l’avenir. Il s’attendait en outre à ce que la faiblesse des investissements des entreprises continue de peser sur la croissance économique durant la deuxième moitié de l’année.

Les membres ont discuté de la dynamique récente du marché du travail, convenant dans l’ensemble que celui-ci s’était assoupli. La plupart des indicateurs du marché du travail étaient plus faibles que leurs fourchettes de référence. Le taux de chômage avait augmenté, passant de 6,6 % en février à 7,1 % en août. Plus de 100 000 emplois avaient été perdus en juillet et en août, ces pertes étant concentrées dans les secteurs qui dépendent du commerce avec les États-Unis. Toutefois, la croissance de l’emploi dans d’autres secteurs de l’économie avait également ralenti, les entreprises ayant réduit leurs intentions d’embauche. La croissance des salaires avait continué de se modérer. Les membres craignaient que le maintien des droits de douane et l’incertitude persistante entourant la politique commerciale américaine affaiblissent davantage le marché du travail dans l’ensemble de l’économie.

Statistique Canada a publié les données sur l’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC) pour le mois d’août pendant les délibérations. L’inflation globale s’était établie à 1,9 %, comme lors de la publication du Rapport de juillet. Si l’on exclut les impôts indirects, l’inflation se situait à 2,4 %, et les mesures de l’inflation fondamentale privilégiées par la Banque – soit l’IPC‑tronq et l’IPC‑méd – demeuraient élevées, aux alentours de 3 %.

Les membres ont passé en revue un large éventail d’indicateurs de l’inflation et ont convenu que ceux-ci continuaient de signaler une inflation sous-jacente d’environ 2½ %. Le Conseil a entre autres noté ce qui suit :

  • l’IPC hors alimentation, énergie et impôts s’établissait à 2,4 %
  • l’IPCX était de 2,6 %
  • la part des composantes de l’IPC affichant une croissance des prix supérieure à 3 % atteignait 39 %, une valeur observée quand l’inflation tend à être autour de 2½ %

Le Conseil a convenu, d’après les plus récentes données sur l’inflation, que la dynamique à la hausse de l’inflation fondamentale observée plus tôt cette année s’était dissipée. Ce fait était particulièrement mis en évidence par les mesures de l’inflation fondamentale sur trois et six mois privilégiées par la Banque, qui avaient été supérieures à 3 % plus tôt en 2025. Au moment des délibérations, l’inflation fondamentale sur trois mois s’établissait plutôt à 2,4 % pour l’IPC‑tronq et à 2,6 % pour l’IPC‑méd, tandis que ces deux mesures sur six mois se situaient à 2,8 %. Le Conseil a aussi convenu que la récente décision du gouvernement fédéral de retirer la plupart des droits de douane de rétorsion sur les biens importés des États-Unis allait avoir pour effet d’alléger les pressions à la hausse sur les prix de ces biens dans l’avenir. Les membres ne disposaient pas de nouvelles données sur les attentes d’inflation.

Considérations pour la politique monétaire

Le Conseil s’est ensuite penché sur les risques et incertitudes pesant sur l’économie canadienne et les perspectives d’inflation.

Les membres ont d’abord discuté des effets de l’incertitude commerciale persistante sur l’économie canadienne. Si l’incertitude à court terme concernant les droits de douane américains s’était atténuée, celle entourant la renégociation de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) commençait à prendre davantage d’importance. Cela risquait fort bien de freiner la reprise des investissements des entreprises à court terme. De plus, en raison de l’utilisation croissante des droits de douane par l’administration américaine pour exercer des pressions géopolitiques sur d’autres pays, l’incertitude mondiale restait élevée.

Les membres se sont demandé si la vigueur récente des dépenses des ménages allait se maintenir, compte tenu de l’assouplissement du marché du travail et de la faible confiance des consommateurs. Après une longue période de contraction qui s’était terminée en 2024, la consommation par habitant avait retrouvé le niveau observé avant la pandémie de COVID-19. Les baisses antérieures du taux directeur avaient peut-être contribué à cette reprise. Les membres étaient d’accord pour dire que la consommation allait continuer de soutenir la croissance dans l’avenir. Dans l’ensemble, il était attendu que l’économie connaisse une progression modérée, correspondant à peu près à celle postulée dans le scénario de maintien des droits de douane présenté dans le Rapport de juillet.

Les membres ont poursuivi la discussion entamée à la réunion de juillet au sujet du rôle approprié de la politique monétaire dans le contexte d’un choc qui touche à la fois la demande et l’offre.

Le revirement de la politique commerciale des États-Unis avait clairement une incidence sur la demande de biens et de services canadiens. Il était possible que la croissance économique ralentisse davantage pendant que les ajustements des investissements des entreprises et de l’emploi allaient s’opérer. Cependant, le Conseil a aussi reconnu que cette faiblesse était le reflet d’une économie s’adaptant à un important changement structurel, où de nombreux secteurs doivent s’adapter au nouvel environnement commercial mondial. La politique monétaire n’est pas bien adaptée pour remédier aux chocs structurels.

Vu l’incertitude entourant les répercussions de ces changements structurels sur la demande et l’offre, les membres ont reconnu qu’il était particulièrement difficile d’évaluer la marge de capacités excédentaires dans l’économie. Les perspectives d’inflation étaient donc soumises à une incertitude plus grande que d’habitude. En même temps, le ralentissement de l’expansion démographique au Canada allait continuer de peser sur la croissance potentielle. En conséquence, le Conseil a convenu qu’il devrait procéder avec prudence dans l’ajustement de l’orientation de la politique monétaire.

Les membres ont reconnu que, compte tenu des déclarations récentes des pouvoirs publics, il était probable que les investissements du gouvernement fédéral et des provinces dans les infrastructures ainsi que dans le soutien aux secteurs et aux travailleurs touchés par les droits de douane soient plus importants que ce qui était postulé dans les scénarios du Rapport de juillet. Comme d’habitude, une fois les plans de dépenses fédéral et provinciaux déposés, le Conseil allait examiner leur incidence macroéconomique globale et l’intégrer dans ses perspectives.

En ce qui concerne l’inflation, les membres étaient d’accord pour dire que les risques à la hausse avaient diminué. La dynamique haussière de l’inflation sous-jacente semblait s’être inversée. De plus, la plupart des contre-mesures tarifaires visant les produits américains avaient été levées. Cela signifiait qu’il n’existait plus de risque important que les coûts des droits de douane soient transmis aux consommateurs canadiens et créent un effet d’entraînement sur les autres prix. Il était aussi probable que la baisse des coûts des intrants liés à la main-d’œuvre, au transport et aux matériaux se traduise par une diminution des pressions inflationnistes dans l’avenir.

Les membres ont souligné que, même si les risques à la hausse avaient diminué, ils n’avaient pas disparu. Les perturbations commerciales allaient entraîner de nouveaux coûts. Ce qui demeurait incertain, c’était l’ampleur de ces coûts, quand et où ils pourraient se matérialiser, de même que leurs répercussions possibles sur l’inflation. La réorganisation de l’architecture commerciale du Canada signifiait que l’économie fonctionnerait moins efficacement, entraînant des coûts supplémentaires. De plus, les droits de douane sur les importations arrivant aux États-Unis allaient possiblement avoir des contrecoups et accentuer les pressions sur les prix au Canada, étant donné que de nombreux produits provenant de l’étranger transitent par les États-Unis avant d’arriver au Canada.

Dans l’ensemble, les membres ont convenu que l’économie canadienne s’était affaiblie en raison des perturbations commerciales, tandis que les risques à la hausse entourant l’inflation avaient diminué.

Décision de politique monétaire

Les membres ont discuté de l’orientation appropriée à donner à la politique monétaire, compte tenu des risques et des incertitudes pesant sur l’économie et l’inflation. Deux options ont fait l’objet de discussions : maintenir le taux directeur à 2,75 % ou l’abaisser de 25 points de base pour le faire passer à 2,5 %.

Les membres ont discuté des arguments en faveur du maintien du taux directeur à 2,75 %. Les mesures de l’inflation fondamentale étaient encore élevées, autour de 3 %. La forte croissance de la consommation au deuxième trimestre pouvait être le signe d’un regain de vigueur des dépenses de consommation. L’incertitude entourant la politique commerciale était encore élevée, et l’incidence des changements structurels de l’économie canadienne sur la croissance et la production potentielle était difficile à évaluer. De plus, l’ampleur et la persistance des coûts liés à la perturbation du commerce ainsi que la manière dont ceux-ci allaient se transmettre aux prix à la consommation étaient incertaines. Enfin, les membres ont reconnu que les baisses antérieures du taux directeur étaient encore en train de se propager dans l’économie.

Le Conseil a ensuite relevé trois faits nouveaux importants survenus depuis la décision de juillet qui justifiaient une baisse du taux directeur. Premièrement, l’économie s’était affaiblie, et le marché du travail s’était encore assoupli. Deuxièmement, les données mensuelles récentes sur l’inflation donnaient davantage d’indications que les pressions à la hausse sur l’inflation fondamentale s’atténuaient. Troisièmement, la levée de la plupart des droits de douane de rétorsion par le Canada signifiait que les risques à la hausse entourant l’inflation avaient diminué.

Après avoir examiné tous ces facteurs, le Conseil a jugé que l’équilibre des risques penchait désormais en faveur d’une baisse du taux directeur. L’économie était plus faible et, même s’il restait des signaux contradictoires, les pressions inflationnistes semblaient mieux maîtrisées. Les membres ont donc décidé de réduire le taux directeur à 2,5 % afin de mieux équilibrer les risques dans l’avenir.

Le Conseil a convenu de continuer à souligner que, compte tenu de l’incertitude encore élevée, il se laisserait guider par son évaluation des risques entourant l’inflation. Il s’est également entendu pour dire qu’il continuerait à faire porter ses analyses sur un horizon plus court que d’ordinaire et adopterait une démarche axée sur la gestion des risques. Les membres ont reconnu qu’il existait des risques dans les deux sens et ont convenu de rester prêts à réagir à de nouveaux renseignements.

Enfin, compte tenu de la relative stabilité de la situation des droits de douane américains depuis le Rapport de juillet, les membres s’attendaient à être en mesure de présenter des projections de référence pour la croissance et l’inflation dans le Rapport d’octobre.

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