Le résumé qui suit rend compte des délibérations du Conseil de direction de la Banque du Canada ayant mené à la décision de politique monétaire annoncée le 10 décembre 2025.

Il reflète les discussions et les délibérations qu’ont tenues les membres du Conseil de direction à la troisième étape du processus entourant les décisions de politique monétaire, soit après avoir reçu toutes les informations et recommandations pertinentes du personnel.

Les réunions concernées, présidées par le gouverneur Tiff Macklem, ont débuté le 5 décembre 2025. La première sous-gouverneure Carolyn Rogers, le sous-gouverneur Toni Gravelle, la sous-gouverneure Sharon Kozicki, le sous-gouverneur Nicolas Vincent, le sous-gouverneur Rhys Mendes et la sous-gouverneure Michelle Alexopoulos y ont participé.

Économie internationale

Les membres du Conseil de direction ont entamé leurs délibérations en discutant des évolutions économiques à l’international depuis la parution du Rapport sur la politique monétaire d’octobre. Les membres ont convenu que l’économie mondiale continuait d’être résiliente face au protectionnisme américain.

Aux États-Unis, l’absence de données officielles pendant la paralysie partielle du gouvernement brouillait les cartes. Selon les informations disponibles, les fortes dépenses de consommation et les investissements dans l’intelligence artificielle avaient continué de soutenir la croissance. Le taux de chômage était relativement stable, malgré une hausse du nombre de mises à pied dans le secteur privé. Les membres se sont demandé si les premiers aperçus des ventes au détail du Vendredi fou permettaient de penser que la consommation aux États-Unis grimperait plus qu’elle le fait d’habitude pendant cette période. La hausse des cours boursiers soutenait probablement un peu les dépenses de consommation des ménages mieux nantis. L’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC) américain avait légèrement augmenté en septembre, probablement parce que les droits de douane s’étaient répercutés en partie sur les prix à la consommation. Les membres ont noté que si les droits de douane s’y répercutaient davantage, il pourrait y avoir un risque à la hausse pour l’inflation aux États-Unis.

Dans la zone euro, la croissance semblait plus forte au moment des délibérations que ce qui était prévu dans le Rapport d’octobre. Cette vigueur tenait en grande partie à la hausse de la demande de services. Dans l’avenir, une poussée des exportations chinoises vers la région pourrait faire concurrence au secteur local de la fabrication et peser sur la croissance. L’augmentation des dépenses de défense pourrait toutefois contrebalancer ces pressions.

En Chine, la croissance était plombée par la faiblesse des dépenses des ménages et des investissements des entreprises. Les exportations soutenaient la croissance, et on s’attendait à ce que les investissements des entreprises s’améliorent un peu.

Les membres ont discuté brièvement des conditions financières mondiales, des prix du pétrole et de la situation du dollar canadien – qui étaient pratiquement les mêmes qu’au moment de la parution du Rapport d’octobre.

Économie canadienne et perspectives d’inflation au pays

Les membres ont ensuite porté leur attention sur l’évolution récente de l’économie canadienne. Depuis la parution du Rapport d’octobre, Statistique Canada avait publié des données sur le produit intérieur brut (PIB) pour le troisième trimestre ainsi que des données révisées des comptes nationaux pour les années précédentes.

Compte tenu des révisions à la hausse du PIB pour la période de trois ans s’étant terminée en 2024, l’économie avait commencé 2025 sur des bases plus solides qu’on le pensait. La demande était plus robuste avant le conflit commercial avec les États-Unis. La capacité de production de l’économie avait aussi été accrue par des investissements plus élevés et une certaine amélioration de la croissance de la productivité. Les membres étaient d’accord pour dire que cela pouvait expliquer en partie la résilience de l’économie canadienne face au choc commercial.

Après s’être contracté de 1,8 % au deuxième trimestre, le PIB a progressé de 2,6 % au troisième trimestre – soit davantage que ce qui était attendu. Le Conseil a souligné que cette vigueur du PIB au troisième trimestre était surtout attribuable à une baisse importante des importations. De plus, l’accumulation des stocks était moins marquée que prévu, et avait donc eu un effet modérateur moindre sur la croissance. Après avoir vivement diminué au deuxième trimestre, les exportations avaient augmenté – quoique modestement. La demande intérieure finale était restée stable. Les investissements des entreprises et la consommation, eux, avaient reculé. Les membres ont reconnu que l’incertitude et la volatilité entourant les données faisaient qu’il était plus difficile d’avoir un signal clair quant à la vigueur de l’économie. Vu l’absence de données américaines sur le commerce, les membres ont fait remarquer que les révisions pourraient être plus nombreuses et plus importantes que d’habitude à l’avenir. Les membres s’attendaient à ce que le PIB du quatrième trimestre soit faible, marqué par une hausse de la consommation, de l’activité sur le marché du logement et des dépenses publiques compensant une faiblesse dans les investissements des entreprises et les exportations nettes.

Le Conseil était encouragé par les gains d’emploi dont l’Enquête sur la population active de novembre faisait état. En effet, après trois mois de forte croissance de l’emploi, le taux de chômage était descendu à 6,5 %. Même si cela indiquait une amélioration du marché du travail, un ensemble plus large d’indicateurs brossait un tableau contrasté de la situation. Après avoir enregistré d’importantes pertes au cours de l’été, l’emploi dans les secteurs les plus exposés aux échanges commerciaux s’était stabilisé et établi à un niveau plus bas qu’avant le conflit commercial. D’autres secteurs, surtout celui des services, avaient stimulé l’emploi global au cours des mois précédents. Les membres du Conseil de direction ont noté que les embauches des trois mois précédents visaient principalement des emplois à temps partiel. Les membres ont aussi remarqué que le nombre de postes vacants était faible et que selon les enquêtes menées auprès des entreprises, les intentions d’embauche étaient modérées.

L’inflation mesurée par l’IPC était descendue à 2,2 % en octobre, conformément aux attentes. Les membres, qui disposaient des données d’un seul mois depuis leur dernière décision, voyaient peu de changements dans la dynamique de l’inflation. Les mesures de l’inflation fondamentale se situaient entre 2½ et 3 %, et celles sur trois mois étaient en général restées légèrement en deçà de celles sur douze mois. Les membres ont convenu que l’inflation sous-jacente restait autour de 2½ %.

Les membres ont souligné qu’il était probable que l’inflation mesurée par l’IPC augmente un peu au cours des mois à venir. Les taux de l’inflation mesurée par l’IPC sur un an se rapportant à certaines composantes de biens et services seraient plus élevés, car les prix avaient temporairement baissé pendant le congé de TPS/TVH d’il y a un an. Abstraction faite de la variabilité à court terme, le Conseil continue de s’attendre à ce que la faible demande et les capacités excédentaires persistantes dans l’économie contrebalancent plus ou moins les pressions sur les coûts associées à la réorganisation du commerce, gardant l’inflation mesurée par l’IPC proche de la cible de 2 %. Les membres ont supposé que les mesures de l’inflation fondamentale diminueraient graduellement dans les prochains mois.

Considérations relatives à la politique monétaire

Les membres ont discuté des principaux risques qui pesaient sur leurs perspectives, soit l’évolution des politiques commerciales et l’incertitude entourant la réaction de l’économie aux changements structurels.

En ce qui concerne les politiques commerciales, les membres ont convenu que la révision à venir de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) représentait un risque important. L’incertitude qui régnera pendant les négociations, et d’ici là, pèsera probablement sur les investissements des entreprises. Les membres ont indiqué que les chefs d’entreprise rencontrés partout au pays considéraient l’avenir de l’ACEUM comme un risque stratégique important pour leur entreprise. Si un scénario pessimiste se réalisait et amenait la dissolution de l’ACEUM et une hausse des droits de douane, ce serait très dommageable pour l’économie canadienne. Si toutefois les négociations de l’ACEUM débouchaient sur une certaine stabilité des politiques commerciales nord-américaines, cela pourrait stimuler les investissements des entreprises.

Les membres se sont aussi demandé comment l’économie réagirait aux changements structurels découlant de la réorganisation du commerce mondial. L’ampleur, la rapidité et l’incidence de ces changements dans l’ensemble des régions et des secteurs de l’économie canadienne représentaient une source d’incertitude considérable. De plus, la volatilité des derniers indicateurs trimestriels du PIB laissait entrevoir à quel point il serait difficile d’évaluer les tendances économiques de fond.

Les membres ont reconnu que les mesures appropriées pour faire face à cette transition structurelle relèvent de la politique budgétaire ou industrielle, puisque la politique monétaire ne peut pas réparer une perte d’offre. Les gouvernements offraient du soutien aux secteurs touchés par les droits de douane et les perturbations commerciales. Le budget fédéral contenait des mesures visant à accroître les investissements publics et privés, mais les membres étaient d’accord pour dire qu’il faudrait un certain temps avant que leurs effets se fassent pleinement sentir.

Selon les données du PIB pour le troisième trimestre et les révisions apportées aux données des comptes nationaux des années précédentes, l’économie semblait afficher un peu moins de capacité excédentaire que ce qu’on avait d’abord estimé. Mais devant la faiblesse attendue du PIB au quatrième trimestre, notamment, les membres ont convenu que l’économie demeurait en situation d’offre excédentaire. Les coûts plus élevés découlant de la réorganisation du commerce risquaient toujours de se répercuter sur les prix à la consommation. Mais jusque-là, les effets avaient été limités, ce qui pourrait s’expliquer en partie par la croissance plus lente des coûts unitaires de main-d’œuvre. Et compte tenu de la demande modérée, les entreprises étaient moins susceptibles de répercuter des hausses de coûts sur leurs clients. Les membres s’entendaient pour dire que les informations reçues depuis la dernière décision avaient modifié la dynamique à court terme de la croissance du PIB, mais qu’elles n’avaient pas changé leur perspective selon laquelle le PIB allait progresser à un rythme modéré en 2026 et l’inflation allait rester proche de la cible de 2 %.

En somme, les membres étaient d’avis que l’économie canadienne montrait des signes de résilience après une année de perturbations commerciales, mais que l’incertitude demeurait élevée. La prudence allait rester de mise dans leur interprétation des nouvelles données, étant donné la volatilité récente, et le Conseil serait prêt à réagir si ses perspectives changeaient de façon importante.

Décision de politique monétaire

Compte tenu de tous ces éléments, le Conseil a évalué l’orientation de la politique monétaire.

Après avoir baissé le taux directeur en octobre – ce qui a porté la baisse totale à 100 points de base depuis le début de l’année –, le Conseil avait indiqué que si l’inflation et l’activité économique évoluaient de manière largement conforme à la projection d’octobre, le taux directeur serait essentiellement au niveau approprié pour maintenir l’inflation près de la cible de 2 %.

Depuis, le Conseil a jugé que l’information obtenue cadrait généralement avec ses perspectives. Dans ce contexte, il a décidé de maintenir le taux directeur à 2,25 %.

Les membres ont convenu qu’un taux directeur à la limite inférieure de la fourchette du taux neutre estimé par la Banque était approprié pour fournir un certain soutien à l’économie durant cette transition structurelle, tout en faisant que les pressions inflationnistes restent contenues.

Les membres se sont aussi demandé s’il était plus probable que leur prochain ajustement consiste à monter ou à baisser le taux directeur. Compte tenu de l’incertitude élevée, leur constat commun a été que même si le taux directeur en vigueur était essentiellement au niveau approprié dans la situation existante, il était difficile de prédire le moment et la direction du prochain changement de taux.

Enfin, les membres du Conseil de direction ont échangé des avis sur les facteurs qui pourraient faire changer leurs perspectives d’orientation de la politique monétaire. Leur consensus a été que l’incertitude demeurait élevée et que les nouvelles données seraient évaluées par rapport aux prévisions de la Banque. Si un nouveau choc considérable se matérialisait ou si une accumulation de données indiquait que l’activité économique et l’inflation évoluaient différemment de ses attentes dans une mesure importante, le Conseil de direction serait prêt à réagir.

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