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Déclaration préliminaire devant le Comité permanent des finances de la Chambre des communes

Monsieur le Président, distingués membres du Comité,

C'est toujours avec plaisir que je me présente devant vous après la parution d'un nouveau Rapport sur la politique monétaire, dont la neuvième livraison a été mise en circulation mercredi dernier. Il y a maintenant quatre ans que la Banque du Canada publie tous les six mois ce rapport dans le cadre des efforts qu'elle déploie pour améliorer la transparence de ses mesures de politique monétaire et mieux rendre compte de ses actions à ce chapitre.

Chaque livraison du Rapport sur la politique monétaire met surtout l'accent sur les résultats qu'obtient le Canada au chapitre de l'inflation. Mais la maîtrise de l'inflation n'est pas une fin en soi. La politique monétaire a pour objectif de favoriser la création et le maintien d'un climat monétaire propice à la bonne tenue de l'économie, à une forte croissance de l'activité et de l'emploi et à la prospérité des Canadiens et des Canadiennes. La Banque croit fermement que la meilleure contribution que la politique monétaire puisse faire pour que l'économie connaisse une expansion durable est de maintenir l'inflation à un niveau bas et stable. De fait, le taux d'inflation bas et stable que notre pays affiche depuis quelques années a certainement aidé notre économie à traverser des moments difficiles.

Je suis heureux de pouvoir dire également que le système financier mondial est beaucoup plus calme qu'il ne l'était il y a six mois, lors de mon dernier passage devant vous. Le choc dû à la crise financière qui s'est déclenchée en Asie du Sud-Est il y a près de deux ans a été aggravé en août dernier par la décision de la Russie de suspendre les paiements sur sa dette extérieure. Les turbulences que cette situation a créées se sont maintenant beaucoup estompées, et les investisseurs reprennent confiance. Par conséquent, les perspectives de l'économie mondiale sont bien plus encourageantes maintenant qu'elles ne l'étaient en novembre dernier.

Les marchés financiers se sont stabilisés en Asie du Sud-Est, et les chances d'une reprise graduelle dans cette région du globe sont bonnes. Au Brésil, les autorités ont adopté un train de mesures importantes pour résoudre leurs problèmes. Dans l'ensemble, les marchés financiers mondiaux semblent mieux à même d'évaluer les risques. Les réductions de taux opérées par les banques centrales de tous les grands pays ont contribué à restaurer la confiance des investisseurs.

Mais ce qui importe plus encore pour le Canada, c'est le dynamisme de l'économie américaine. L'expansion aux États-Unis continue de dépasser les prévisions, et, jusqu'à maintenant, il n'y a pas de signes évidents de pressions inflationnistes. Toutefois, beaucoup d'incertitude continue d'entourer l'évolution de la situation internationale, étant donné les disparités entre la tenue économique des grands pays. Le Japon est toujours en récession, et l'activité se ralentit en Europe. À cause de cela, nous ne prévoyons qu'un léger raffermissement des prix des produits de base cette année.

Au Canada, les exportations ont été le moteur de l'expansion ces derniers temps. La robustesse de la demande américaine, la faiblesse relative du dollar canadien et la plus grande compétitivité des manufacturiers canadiens nous permettent de réaliser de très bonnes ventes aux États-Unis.

Mais nous nous attendons maintenant à un accroissement de la dépense des ménages et des entreprises au Canada même. Nous croyons que le regain de confiance des entreprises et des consommateurs que nous avons pu observer au cours des derniers mois, l'amélioration de la situation de l'emploi et les baisses récentes des taux d'intérêt aideront à soutenir la dépense intérieure.

Plus précisément, nous avons, à la Banque, majoré nos prévisions au sujet de la croissance de l'économie canadienne en 1999 par rapport à celles que nous formulions il y a six mois. Nous pensons maintenant que cette croissance se situera dans une fourchette de 2 3/4 à 3 3/4 %. La largeur de cette fourchette est attribuable à l'incertitude entourant la situation internationale que j'ai signalée tout à l'heure. Nos prévisions les plus élevées dépassent nettement les plus récentes projections sur lesquelles s'entendent en général les prévisionnistes du secteur privé. Si, de fait, l'expansion économique s'approche de 3 3/4 %, c'est que la bonne tenue du Canada au chapitre des prix et des coûts aura donné lieu à une augmentation plus vive des exportations et à une plus grande substitution des importations par des produits fabriqués chez nous. L'expansion de l'économie canadienne devrait se poursuivre sensiblement au même rythme en l'an 2000.

Sur la foi de ces prévisions, nous estimons que l'inflation tendancielle devrait s'accélérer quelque peu au cours des dix-huit prochains mois, mais se maintenir dans la moitié inférieure de la fourchette de maîtrise de l'inflation de 1 à 3 % que vise la Banque. On croit de plus en plus, tant au pays qu'à l'étranger, que le taux d'inflation va rester bas au Canada.

Une autre source d'incertitude à l'heure actuelle pour la Banque concerne les estimations de la marge de capacités inutilisées au sein de l'économie. Selon nos méthodes de calcul traditionnelles, les capacités excédentaires actuelles seront entièrement absorbées au deuxième semestre de l'an prochain si l'activité croît au rythme prévu. Toutefois, notre économie a subi des changements importants durant les années 1990, de sorte que les estimations traditionnelles de la marge de capacités inutilisées pourraient ne plus être exactes. C'est pourquoi la Banque accordera une importance accrue à un ensemble d'indicateurs pour évaluer le degré des pressions qui s'exercent sur l'appareil de production. Je pense notamment à l'évolution effective de l'inflation par rapport au taux attendu, à l'expansion de la monnaie et du crédit, aux pressions sur les salaires, aux signes de goulots d'étranglement du côté de l'offre et aux renseignements que nos représentants régionaux obtiennent de leurs contacts.

Monsieur le Président, nous ne saurons pas dans quelle mesure l'économie canadienne a changé tant que ses capacités de production n'auront pas été soumises à plus de pressions. Si la confiance des Canadiens à l'égard du maintien de l'inflation à de bas niveaux procure à la politique monétaire une plus grande latitude pour composer avec les pressions de la demande susceptibles d'éprouver les limites des capacités de production de notre économie, il reste que la Banque devra surveiller avec beaucoup d'attention les indicateurs que je viens de mentionner. Nous ne devons pas compromettre le bas taux d'inflation et les bas taux d'intérêt que nous avons réussi à atteindre au Canada et sur lesquels s'appuient nos progrès économiques.