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Sommaire de l’enquête de 2010 sur la couverture du risque de change dans les entreprises canadiennes

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Depuis 2004, la Banque du Canada sonde 1 chaque année des banques actives sur le marché canadien des changes, notamment les onze membres du Comité canadien des marchés des changes (CCMC), en leur soumettant un questionnaire pour évaluer les stratégies de couverture du risque de change utilisées par leur clientèle d’entreprises canadiennes 2. Le questionnaire de 2010 a été allongé afin d’inclure les opérations de couverture associées tant aux clients financiers nationaux qu’aux clients institutionnels étrangers ayant des positions en dollars canadiens, montrant ainsi l’importance accrue de ces deux groupes sur le marché des changes. Cette année, l’enquête a aussi permis, d’une part, d’examiner l’incidence de la crise financière sur les opérations de couverture effectuées par les institutions et les entreprises et, d’autre part, de découvrir les changements technologiques adoptés par cette clientèle. Le sommaire regroupe les réponses du questionnaire qui ont été recueillies en août, ainsi que les informations obtenues en septembre dans le cadre d’entretiens. Les opinions reproduites sont celles que les participants ont exprimées au sujet des opérations de couverture du risque de change menées par leurs clients.

Si les réponses des banques à propos de leurs opérations de couverture diffèrent en partie selon la composition régionale et sectorielle de leur propre clientèle, de grands thèmes communs, résumés ci‑après, se dégagent néanmoins. Les résultats s’expliquent par le caractère non scientifique de l’enquête et par les différences entre la stratégie de couverture des clients institutionnels et celle des entreprises 3.

  • La proportion la plus importante des expositions au risque de change était liée au dollar américain (représentant jusqu’à 80 % des expositions totales selon le type de clientèle), l’euro et la livre sterling arrivant ensuite. L’exposition aux monnaies des marchés émergents a connu une hausse notable. Conformément aux politiques en la matière, ce risque de change est couvert à environ 50 %.
  • Le volume des opérations des clients institutionnels dépasse grandement les flux attribuables aux entreprises, ce qui confirme les données de l’enquête triennale sur l’activité des marchés des changes qu’effectue la Banque des Règlements Internationaux (BRI). Du côté des entreprises, l’activité de couverture des exportateurs domine.
  • L’incidence du récent niveau du dollar canadien a varié selon la catégorie de clientèle. De l’avis des banques, l’effet a été positif pour les importateurs canadiens et les clients institutionnels étrangers, mais neutre pour la clientèle institutionnelle canadienne. Le niveau récent du huard a eu sur les exportateurs canadiens une incidence jugée négative; toutefois, certaines des observations rapportées indiquent que les exportateurs sont maintenant mieux placés qu’auparavant pour faire face à la vigueur du dollar canadien.
  • Les banques estiment que la valeur moyenne du dollar canadien retenue par leur clientèle dans ses prévisions budgétaires est de 0,9527 $ É. U. et que cette valeur se situe à l’intérieur d’une fourchette comprise entre 0,8728 $ et 1,0363 $ É.-U.
  • La crise financière est perçue comme un facteur qui a profondément modifié les pratiques des clients en matière de couverture, ceux-ci s’attachant à respecter plus scrupuleusement leurs politiques de couverture et portant une attention croissante à l’efficacité de ces stratégies. Les clients sont également devenus plus attentifs au risque de contrepartie auquel ils sont exposés. Les banques ont ainsi signalé un usage plus fréquent des conventions-cadres de l’International Swap Dealer Association (ISDA) et des annexes correspondantes de soutien au crédit. En outre, la clientèle a augmenté le nombre de contreparties avec lesquelles elle effectue ses opérations de change. Les participants ont aussi relevé que les plateformes de négociation électroniques et les services administratifs automatisés sont utilisés plus souvent en vue d’améliorer l’efficience des opérations et de réduire le risque opérationnel.

Les thèmes de l’enquête sont développés ci-après dans une synthèse plus détaillée.

Comment se ventile la clientèle des banques, son risque de change et ses opérations de couverture?

L’enquête s’adressait à une clientèle qui avait des besoins de couverture vis-à-vis de l’évolution du dollar canadien. Ce groupe de la clientèle des banques se divise de plus en plus entre clients institutionnels, parmi lesquels figurent les fonds de pension et les fonds de placement, et entreprises (exportateurs et importateurs), les premiers étant désormais responsables de la majeure partie du volume des opérations de couverture, selon les participants à l’enquête. Cette hausse de l’encours des opérations attribuables aux clients institutionnels confirme la tendance relevée dans l’enquête triennale des banques centrales sur l’activité des marchés des changes qu’effectue la Banque des Règlements Internationaux (BRI), le volume des transactions des institutions financières y dépassant celui des sociétés non financières. Du côté des clients institutionnels, les opérations de couverture du risque de change réalisées par les fonds de pension et de placement canadiens étaient nettement supérieures à celles des fonds de pension et de placement étrangers. En ce qui concerne les entreprises, l’activité des exportateurs canadiens représentait une part beaucoup plus grande des flux associés aux opérations de couverture que l’activité des importateurs. En outre, les participants ont signalé un intérêt croissant des gestionnaires de réserves et des fonds souverains pour les produits financiers libellés en dollars canadiens.

Dans l’ensemble, les participants ont indiqué que les opérations de change entre le dollar canadien et le dollar américain constituaient la proportion la plus importante des expositions au risque de change de leurs clients et que les opérations concernant l’euro ou la livre sterling arrivaient ensuite. Le risque de change auquel s’exposaient les entreprises était lié à environ 80 % au dollar canadien, alors que cette monnaie représentait seulement 50 à 60 % des expositions des clients institutionnels. Si les avis sont partagés quant à savoir si le risque de change a augmenté depuis l’année précédente, tous s’entendent en revanche pour dire que l’exposition aux marchés émergents et les opérations de couverture associées à ces marchés ont progressé dans les deux clientèles, les clients institutionnels ayant étoffé leurs portefeuilles de placement et les entreprises ayant augmenté leurs acquisitions ou leurs sources d’intrants à l’étranger.

Les entreprises et la clientèle institutionnelle ont couvert approximativement 50 % de leurs positions de change, une proportion qui cadre avec les niveaux prévus par les politiques de couverture de nombreux clients. Les banques ont également rapporté que certaines entreprises suivaient, pour les projets d’immobilisations, une stratégie de couverture différente de la stratégie qu’elles déployaient pour leurs revenus ou dépenses. En général, les pratiques en matière de couverture dépendent du cours actuel de la monnaie, les clients modifiant la durée ou l’échéance de leur couverture quand ils jugent que ce cours est sous-évalué ou surévalué au regard de leurs propres attentes. Néanmoins, des participants ont signalé une baisse des opérations de couverture, qu’ils expliquent par le fait que, cette année, le dollar canadien se négocie depuis peu à l’intérieur d’une fourchette restreinte qui continue de correspondre très largement au niveau attendu par les clients. L’enquête révèle que les opérations de couverture liées aux marchés émergents ont crû, mais qu’une partie de la clientèle, en ce qui concerne la couverture de sa position sur certains de ces marchés, est soumise à des contraintes, en raison de la disponibilité limitée de produits de couverture, du coût des couvertures ou de l’ampleur relativement moindre de ce risque de change comparativement au risque lié à d’autres monnaies.

D’après les banques interrogées, le type d’instrument financier utilisé pour couvrir le risque de change dépend largement de l’activité principale des clients 4. Pour les entreprises, plus de 50 % des opérations de couverture reposent sur des contrats de change à terme, et les options sur devises représentent de 10 à 15 % du volume des opérations. Les stratégies reliées aux options classiques sur devises forment la majeure partie des options utilisées, et les options structurées restent employées de façon plus limitée du fait des règles comptables. Les participants ont toutefois indiqué que quelques-unes des grandes entreprises se soucient, de plus en plus, de la valeur économique effective de leur couverture en la différenciant de son traitement comptable, ce qui conduit à un intérêt accru pour les couvertures procurées par les options. Les clients institutionnels recourent eux aussi prioritairement à des contrats de change à terme, et les options sur devises constituent également de 10 à 15 % du volume total de leurs opérations de couverture. Ces clients ont cependant été très actifs en renouvelant régulièrement leurs couvertures par swaps de change, étant donné la durée plus longue de leurs investissements, ce qui a contribué à une hausse du volume global des opérations de couverture parmi cette clientèle. Les clients institutionnels mesurent la valeur de leurs opérations sur devises en fonction du cours en vigueur à Londres à 11 h (HE), alors que les entreprises privilégient le taux de change donné par la Banque du Canada à midi (HE).

Les banques rapportent par ailleurs que les exportateurs canadiens utilisent des couvertures naturelles pour réduire le montant de la couverture du risque de change qui leur est nécessaire, en contractant, par exemple, des prêts en dollars américains afin de couvrir leurs revenus ou acquisitions dans cette monnaie. Des producteurs de matières premières, quant à eux, auraient couvert uniquement leurs expositions aux prix des produits et non le risque de change, puisqu’ils s’attendaient à ce que la hausse des prix des matières premières neutralise toute appréciation monétaire.

Les banques relèvent que la fréquence des opérations de couverture varie selon la catégorie de clientèle, les clients institutionnels recourant plus souvent à des couvertures, y compris à un rythme quotidien ou hebdomadaire, tandis que dans leur vaste majorité, les entreprises n’emploient les instruments de couverture que sur une base mensuelle ou trimestrielle.

Quelles sont les attentes des participants par rapport au niveau du dollar canadien et à son effet sur leurs clients?

L’incidence du récent niveau du dollar canadien a varié selon la catégorie de clientèle. Au dire des banques, l’effet a été plutôt neutre pour les clients institutionnels canadiens, l’éventail des opinions dans leur cas allant de neutre à assez négatif dans la mesure où la fermeté du dollar canadien s’est légèrement répercutée sur le rendement du portefeuille des placements faits à l’étranger. Par contre, d’après les réponses recueillies, le niveau récent du dollar canadien a eu sur les clients institutionnels étrangers, dont les gestionnaires de réserves, un effet qui va de neutre à très positif, et la plupart des participants ont jugé que l’impact avait été positif. De l’avis des banques, l’incidence des récents mouvements du dollar canadien a été plus négative sur les exportateurs canadiens, cet effet étant jugé en moyenne assez négatif et l’éventail des opinions allant de neutre à très négatif. Toutefois, certaines observations des banques sondées indiquent que les exportateurs sont maintenant mieux placés pour faire face à la vigueur du dollar canadien qu’au cours des années passées, car l’appréciation du dollar canadien est un peu contrecarrée par les prix élevés des matières premières. En général, les importateurs canadiens sont perçus comme ayant été avantagés par les fluctuations du dollar canadien au cours de la dernière année, l’éventail des opinions s’étendant de positif à très positif. Les banques signalent globalement que les opérations de couverture au cours de la dernière année ont eu une répercussion légèrement positive sur les activités de leurs clients même si elles sont quelques‑unes à faire remarquer que les importateurs n’ont pas complètement profité de la poursuite de l’appréciation du huard.

Les participants ont été invités à estimer le niveau du dollar canadien que leur clientèle a retenu dans son budget de 2010 et 2011. Le niveau moyen, aussi bien pour 2010 que pour 2011, se situe près du centre de la fourchette dans laquelle le dollar évolue depuis mai (voir les estimations du Tableau 1). Quoi qu’il en soit, la fourchette des estimations est relativement large : de l’ordre de 15 cents pour 2010 et de 18 cents pour 2011.

Tableau 1 : Estimation par les participants du niveau du dollar canadien que retient leur clientèle dans son budget de 2010 et 2011*

2010

2011

Niveau moyen

1,0441 (0,9578)

1,0496 (0,9527)

Sommet

1,1058 (0,9043)

1,1458 (0,8728)

Plancher

0,9617 (1,0398)

0,9650 (1,0363)

* La valeur du dollar canadien exprimée en dollars américains est donnée entre parenthèses.

Quelles conséquences la crise financière a-t-elle eues sur les opérations de couverture des clients et comment cela s’est-il traduit sur leurs pratiques en matière de couverture?

En général, le thème récurrent qui se dégage des réponses du questionnaire est l’attention accrue que les clients portent au risque de contrepartie ou de crédit. Les banques ont donc signalé un usage plus fréquent des conventions-cadres de l’ISDA et des annexes correspondantes de soutien au crédit depuis la crise financière. C’est particulièrement vrai dans le segment des entreprises, où ces conventions étaient moins répandues avant la crise. La majorité des opérations de couverture du risque de change faites par les clients institutionnels, voire presque la totalité de ces opérations selon certaines banques, relèvent désormais de ce type d’accords, et même si les proportions sont moindres du côté des entreprises, la plupart des banques exigent maintenant que les transactions de change de longue durée soient menées sous de telles conventions. Les banques ont souligné que les conventions-cadres ont l’avantage de permettre aux clients de compenser des positions afin de libérer les marges de crédit, tout particulièrement chez les clients actifs ayant de multiples positions inverses à régler le même jour. Le plus souvent, ces accords sont vus comme un moyen potentiel de diminuer le coût direct de transaction de la couverture pour le client. Quelques banques ont toutefois mentionné que certaines entreprises, n’étant pas en mesure de surveiller ou de déposer des garanties, sont moins enclines à conclure ce genre de conventions, surtout sous forme d’annexes de soutien au crédit.

D’après les réponses, certaines pratiques de la clientèle ont changé en matière de couverture à la suite de la crise, étant donné que les clients institutionnels et les entreprises s’attachent à respecter plus scrupuleusement les politiques de leurs organisations sur ce plan ou adoptent des politiques plus rigoureuses après avoir porté davantage attention à l’efficacité de leurs stratégies internes de couverture. Les banques ont indiqué que les entreprises sont aussi devenues de plus en plus attentives à la stratégie de couverture de leurs concurrents. Elles ont également indiqué qu’une partie de la clientèle a étendu sa liste de contreparties de façon à disposer d’une souplesse accrue lorsqu’elle met en place une couverture pour ses positions de change, ce qui témoigne de la baisse de liquidité du marché et d’un resserrement de l’accès aux marges de crédit. Les options classiques sur devises apparaissent comme un instrument de couverture attrayant, car elles pèsent peu sur les marges de crédit, en particulier depuis que les importantes variations de change survenues pendant la crise ont entraîné une très forte utilisation des marges existantes. Les banques ont toutefois relevé aussi une baisse de l’emploi des options, que justifie la hausse de coût causée par l’accentuation de la volatilité implicite des taux de change durant la crise. Les banques ont aussi mentionné que les entreprises ont réduit leurs opérations de couverture du fait de la grande incertitude qui, au cours de la crise, a entouré les perspectives d’évolution de leurs revenus comme de leurs dépenses, et cette incertitude a eu un effet persistant dans les périodes plus récentes. Au dire des participants, les conditions sur le marché des changes se sont généralement améliorées depuis la crise, et les conditions relatives aux opérations ont été jugées normales pour les échéances allant jusqu’à un an. Mais, en raison du durcissement des conditions du crédit, les opérations n’ont toujours pas retrouvé leurs niveaux d’avant 2007 pour les échéances supérieures à un an. Des participants ont signalé que le mécanisme de règlement des transactions de change offert par la CLS Bank avait eu une incidence positive sur les volumes des opérations pendant la crise, et plusieurs banques sont d’avis que l’ajout d’un service de règlement le même jour à la CLS Bank se traduira par une réduction supplémentaire du risque de règlement et du risque opérationnel.

Le recours aux technologies et à l’automatisation a aussi augmenté comme l’illustre l’utilisation accrue que les clients institutionnels et les entreprises font des plateformes de négociation électroniques et des services administratifs automatisés. L’automatisation a conduit au développement du traitement direct, et diminué dès lors le fardeau opérationnel et le risque lié aux opérations, ce qui a permis une expansion des opérations d’une partie de la clientèle.

Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec :


Directeur adjoint
Département des Marchés financiers
613 782-7768


Analyste principale
Département des Marchés financiers
613 782-8684

  1. 1. Les opinions exprimées dans cette synthèse résument les commentaires des représentants des banques qui ont rempli un questionnaire sur les pratiques de leurs clientèles d’entreprises et d’institutions en matière de couverture du risque de change lié au dollar canadien. Ces opinions ne reflètent donc pas nécessairement le point de vue de la Banque du Canada.[]
  2. 2. Les institutions qui ont participé à l’enquête sont les suivantes : la Banque HSBC (Canada), Bank of America Merrill Lynch, Barclays Capital, BMO Marchés des capitaux, Citigroup, Deutsche Securities, Financière Banque Nationale, JP Morgan, Marchés mondiaux CIBC, RBC Marchés des Capitaux, Scotia Capitaux, State Street Global Markets (Canada), UBS et Valeurs mobilières TD.[]
  3. 3. Il arrive néanmoins que les banques aient beaucoup de mal à discerner la nature exacte ou le but précis d’une opération de change.[]
  4. 4. Les différentes catégories de produits financiers abordés dans l’enquête sont les contrats de change à terme, les swaps de change, les options classiques sur devises, les options structurées sur devises, les contrats de change à terme standardisés, les swaps de devises et les autres instruments. Un contrat de change à terme est une entente en vertu de laquelle les parties s’engagent à acheter ou à vendre de la monnaie à une date ultérieure stipulée d’avance. Un swap de change consiste, pour des sommes identiques, dans l’achat et la vente simultanés d’une monnaie contre une autre à deux dates de valeur différentes. L’option classique sur devises confère à un acheteur le droit, mais non l’obligation, sur un montant nominal précis, d’échanger une monnaie contre une autre à un taux de change et à une date ultérieure prédéterminés. Les options structurées sur devises sont une forme plus complexe de contrats (stratégies) d’option qui servent habituellement à diminuer le coût de l’option. Les contrats de change à terme standardisés sont négociés sur un marché à terme boursier. Les swaps de devises sont des contrats d’échange de principal et de flux d’intérêts libellés dans des monnaies différentes et portant sur des montants équivalents.[]