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Déclaration préliminaire devant le Comité permanent des finances de la Chambre des communes

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Monsieur le Président, distingués membres du Comité, bonjour. Carolyn et moi sommes ravis d’être ici à l’occasion de cette rencontre semestrielle sur le Rapport sur la politique monétaire. Aujourd’hui, nous vous donnerons un aperçu des plus récentes prévisions économiques de la Banque, tirées du Rapport publié le 15 avril.

Dans le présent climat de volatilité et d’incertitude, il est utile de conserver une perspective historique. Lorsque nous nous sommes adressés à ce comité il y a un an, le prix du pétrole brut Brent se situait à 100 dollars le baril. En hausse constante depuis une décennie, il était passé de 25 dollars le baril en 2002 à un sommet dépassant légèrement 110 dollars en 2012.

En novembre, lors de notre dernière rencontre, les cours pétroliers avaient atteint leur plus bas niveau en quatre ans, le Brent se négociant en moyenne à 90 dollars le baril. Il était évident pour nous que les consommateurs profiteraient de la diminution des prix du pétrole, mais que les retombées nettes sur l’économie seraient défavorables. Les prix plus bas du pétrole feraient reculer les termes de l’échange et le revenu intérieur du Canada, et auraient une incidence notable sur les investissements, l’activité dans le secteur pétrolier et la chaîne d’approvisionnement connexe du secteur manufacturier.

Toutes ces prévisions se sont matérialisées très rapidement au cours des deux mois suivants. En janvier, le cours du Brent avait chuté et s’établissait en moyenne à 60 dollars le baril.

Les cours pétroliers constituent un élément important des termes de l’échange du Canada et un des facteurs déterminants des variations du dollar canadien. L’augmentation des prix du pétrole de 2002 à 2012 s’est accompagnée d’une hausse de la valeur du huard, qui, d’environ 63 cents américains, est passé au-dessus de la parité.

Ainsi, la baisse des prix du pétrole a déclenché une dynamique complexe, notamment des ajustements sectoriels et régionaux, et il faudra un certain temps pour que cette dynamique se transmette à l’ensemble de l’économie.

Les retombées négatives du repli des cours du pétrole se sont immédiatement répercutées sur certains secteurs de l’économie. Par exemple, l’incidence des prix plus bas sur les revenus et la richesse a déjà fait diminuer les dépenses des ménages. Les diverses conséquences positives - hausse des exportations liée à une économie américaine plus vigoureuse et à un taux de change plus bas, augmentation des dépenses de consommation des ménages à qui l’essence coûte moins cher - ne se feront sentir que progressivement, et on ne sait pas quelle en sera l’ampleur.Par conséquent, en janvier, nous étions confrontés au risque que le retour de l’économie canadienne à son plein potentiel et à une inflation stable de 2 % soit retardé considérablement. C’est pourquoi nous avons pris une assurance contre ce risque, sous la forme d’une réduction de 25 points de base du taux directeur.

Nous avons annoncé cette réduction de taux dans un contexte de détente généralisée des conditions financières à l’échelle mondiale. Pas moins de 25 banques centrales ont assoupli leur politique monétaire au cours des premiers mois de 2015, ce qui s’est traduit par une diminution des taux sur toute la courbe de rendement.

Qu’est-ce qui a motivé cet assouplissement? De nombreuses banques centrales ont accentué la détente monétaire en réaction à la persistance des capacités excédentaires au sein de l’économie ainsi qu’au niveau d’inflation inférieur à la cible. Cet assouplissement, combiné aux implications favorables de la baisse des prix de l’énergie pour la croissance mondiale, devrait aider l’économie du globe à se raffermir tout au long de l’année. La Banque s’attend à ce que la croissance économique mondiale gagne en vigueur pour se situer en moyenne à quelque 3 1/2 % au cours de la période 2015-2017.

Ici, au Canada, nous avons constaté que certains des effets de la chute des cours du pétrole, comme la baisse des dépenses des ménages que j’ai mentionnée plus tôt, se faisaient nettement sentir à la fin de 2014 et au début de 2015. Selon la prévision mise à jour dans le Rapport d’avril, l’économie canadienne a enregistré une croissance nulle au premier trimestre. Bien que les conséquences du choc des cours pétroliers se manifestent plus rapidement qu’on l’avait anticipé initialement, elles ne paraissent pas plus importantes qu’escompté en janvier.

À l’extérieur du secteur de l’énergie, d’autres pans de l’économie semblent afficher une bonne tenue. Les segments des exportations hors énergie qui, selon nos prévisions, devaient tirer la reprise jouent effectivement ce rôle, et nous nous attendons à ce que cette tendance soit renforcée par la croissance plus vigoureuse aux États-Unis et le dollar canadien plus faible. Les résultats de notre enquête sur les perspectives des entreprises donnent à penser que les exportateurs commencent à faire face à des contraintes de capacité, ce qui est de bon augure pour de nouveaux investissements. Et, bien qu’une marge notable de ressources inutilisées subsiste sur notre marché du travail, les facteurs fondamentaux du marché ont commencé à s’améliorer. Quoi qu’il en soit, les entreprises demeurent prudentes dans leurs intentions d’investissement et d’embauche.

Après avoir soupesé ces diverses forces à l’œuvre au sein de l’économie, nous anticipons que la croissance va rebondir en partie au deuxième trimestre et qu’elle dépassera le niveau tendanciel par la suite. Elle se chiffrera en moyenne à 1,9 % pour l’année. Ce profil de croissance prévu nous ramène sur la bonne voie pour une résorption des capacités excédentaires vers la fin de 2016, moment où l’inflation s’établira de façon durable à 2 %. Nous jugeons que les risques qui pèsent sur cette projection sont à peu près équilibrés, mais nous allons les réévaluer continuellement à mesure que de nouvelles données seront disponibles.

Le principal risque entourant ces perspectives tient à l’ampleur et à la durée de l’incidence négative du choc pétrolier, mises en balance avec les forces positives qui s’accumulent dans le secteur non énergétique. Selon nos prévisions, les effets positifs commenceront à se renforcer au deuxième trimestre et cette situation prévaudra nettement au second semestre de l’année. La réduction du taux directeur en janvier et la dépréciation du dollar canadien contribuent à accélérer la transition.

L’inflation mesurée par l’IPC global avoisine 1 %, soit bien en deçà de la cible de 2 %. Cela s’explique en grande partie par la baisse des prix de l’essence, effet qui est temporaire. L’inflation mesurée par l’IPC global serait très près de zéro, si ce n’était des effets de taux de change et d’autres facteurs ponctuels. Quant à elle, l’inflation mesurée par l’indice de référence se situe un peu au-dessus de 2 %, mais elle est aussi alimentée par les effets de taux de change et d’autres facteurs ponctuels. Selon notre projection, ces deux mesures de l’inflation convergeront vers 2 %, les facteurs temporaires se dissipant et l’économie se remettant à tourner à plein régime vers la fin de 2016.

Parallèlement, la question des risques liés à la stabilité financière reste au centre de nos délibérations. Ces risques évoluent conformément à nos attentes. Le niveau d’endettement, mesuré par le ratio de la dette au revenu disponible, continue de s’inscrire en légère hausse. Il est probable qu’il augmentera encore à mesure que la diminution du revenu national brut, attribuable à la réduction des prix du pétrole, se fera sentir dans l’ensemble de l’économie.

En apparence, on pourrait s’attendre à ce que la baisse des taux d’intérêt favorise une hausse de l’emprunt, laquelle aurait pour effet d’accroître cette vulnérabilité. À court terme, toutefois, les taux d’emprunt plus bas vont en fait atténuer ce risque, en réduisant les paiements hypothécaires et en soutenant une croissance économique plus forte et des gains au chapitre de l’emploi. Nous estimons que la meilleure contribution que la Banque puisse apporter pour réduire les risques touchant la stabilité financière au fil du temps est d’aider l’économie à retourner à son plein potentiel et à une inflation stable le plus rapidement possible.

Sur ce, Carolyn et moi serons heureux de répondre à vos questions.