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Rapport sur la politique monétaire – Déclaration préliminaire à la conférence de presse

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Bonjour. Je suis ravi d’être ici en compagnie de la première sous-gouverneure Carolyn Rogers pour parler de l’annonce d’aujourd’hui concernant le taux directeur et du Rapport sur la politique monétaire de la Banque du Canada.

L’invasion non provoquée de l’Ukraine par la Russie cause une énorme souffrance humaine, et nous avons une pensée émue pour le peuple ukrainien. La guerre est aussi une nouvelle source majeure d’incertitude pour les perspectives mondiales et alimente une inflation déjà élevée dans de nombreux pays, dont le Canada.

Dans ce contexte, nous avons trois grands messages ce matin.

Premièrement, l’économie canadienne est forte. En général, elle s’est complètement remise de la pandémie et entre maintenant dans une phase de demande excédentaire.

Deuxièmement, l’inflation est trop élevée. Elle est supérieure à nos attentes et restera élevée pendant plus longtemps que nous le pensions.

Troisièmement, nous avons besoin de taux d’intérêt plus élevés. Le taux directeur est notre principal outil pour maintenir l’équilibre économique et ramener l’inflation à la cible de 2 %. Ce matin, nous avons relevé ce taux de 50 points de base, pour le faire passer à 1 %. Comme nous l’avons indiqué, les Canadiens devraient s’attendre à d’autres hausses.

Laissez-moi vous parler plus en détail de chacun de ces trois thèmes.

Des données récentes donnent à penser que l’économie canadienne a remarquablement bien surmonté la vague omicron de la COVID-19 et qu’elle affiche un grand dynamisme en ce début de deuxième trimestre. Un large éventail d’indicateurs tendent à montrer que notre économie entre maintenant dans une phase de demande excédentaire. Il suffit de regarder le marché du travail pour s’en convaincre. La croissance de l’emploi a été forte, le taux de chômage se situe à un creux historique, le nombre de postes vacants est élevé et la croissance des salaires a atteint les niveaux prépandémie. Les entreprises nous disent aussi qu’elles s’attendent à devoir augmenter encore les salaires pour retenir et attirer les travailleurs.

Pour la période à venir, le dynamisme de la plupart des grandes catégories de dépenses laisse entrevoir une forte croissance du produit intérieur brut cette année. Les Canadiens dépensent davantage pour des services, vu la levée des mesures sanitaires, et les achats de biens restent solides. L’activité sur le marché du logement est encore vigoureuse et devrait se modérer, tout en demeurant à des niveaux élevés. Les investissements des entreprises et les exportations augmentent, et les prix élevés de nombreux produits de base que le Canada exporte font entrer davantage de revenus au pays.

Les taux d’intérêt plus élevés devraient freiner la croissance des dépenses intérieures au cours de cette année et de la suivante. En même temps, les robustes investissements des entreprises, la productivité accrue du travail et la hausse de l’immigration devraient favoriser la capacité de production du Canada. Tout compte fait, la Banque prévoit que la croissance de l’économie canadienne atteindra 4¼ % cette année, avant de ralentir pour s’établir à 3¼ % en 2023 et à 2¼ % en 2024.

L’inflation est la grande priorité de la Banque. Nous sommes parfaitement conscients que l’inflation, déjà élevée, s’est éloignée encore plus de notre cible. L’invasion de l’Ukraine a fait monter les prix de l’énergie et d’autres produits de base, et la guerre perturbe davantage les chaînes d’approvisionnement mondiales. Nous nous préoccupons aussi de la généralisation des pressions sur les prix au Canada. Environ les deux tiers des composantes de l’indice des prix à la consommation (IPC) affichent une hausse de plus de 3 % : les Canadiens sentent donc les effets de l’inflation sur leur budget, que ce soit pour l’essence, les aliments ou le loyer.

Au Canada, l’inflation mesurée par l’IPC a atteint en février son plus haut niveau en trente ans, à 5,7 %, ce qui dépasse la projection du Rapport sur la politique monétaire de janvier. Nous nous attendons maintenant à ce que l’inflation atteigne presque 6 % en moyenne durant la première moitié de 2022 et reste bien au-dessus de notre fourchette de maîtrise de l’inflation de 1 à 3 % tout au long de l’année. Elle devrait ensuite baisser pour s’établir à environ 2½ % au deuxième semestre de 2023, avant de revenir à la cible de 2 % en 2024. Puisque l’inflation se généralise et reste élevée pendant plus longtemps que prévu, il y a un risque que les Canadiens commencent à penser que l’inflation élevée va s’enraciner.

Cela m’amène à mon troisième point : les taux d’intérêt augmentent. Le relèvement du taux directeur est le principal outil que possède la Banque pour modérer la demande, éviter une intensification persistante des pressions sur les prix intérieurs et garder les attentes d’inflation arrimées à la cible de 2 %. On a besoin de taux d’intérêt plus élevés, et l’économie est capable de le prendre.

Les hausses du taux directeur de la Banque font monter les taux d’intérêt que les banques et autres prêteurs exigent, notamment, pour les prêts aux entreprises, prêts à la consommation et prêts hypothécaires qu’ils consentent. Elles font aussi augmenter les intérêts versés sur les produits d’épargne. En rendant les emprunts plus coûteux et l’épargne plus payante, un taux directeur plus élevé freine les dépenses et réduit ainsi la demande globale au sein de l’économie. Et puisque la demande commence à dépasser la capacité de production de l’économie, cela est nécessaire pour rétablir l’équilibre de l’économie et juguler l’inflation au pays.

Nous avons aussi besoin de taux d’intérêt plus élevés pour garder les attentes d’inflation des Canadiens bien ancrées, de manière à ce que l’inflation au pays redescende vers la cible lorsque les pressions inflationnistes mondiales attribuables aux prix élevés du pétrole et à l’engorgement des chaînes d’approvisionnement s’atténueront.

Nous nous sommes engagés à utiliser notre taux directeur pour ramener l’inflation à la cible et nous prendrons, s’il le faut, des mesures énergiques pour y parvenir.

Laissez-moi maintenant vous dire quelques mots sur les délibérations du Conseil de direction.

Nous avons bien sûr discuté des répercussions économiques de l’invasion de l’Ukraine. La guerre a entraîné une hausse des prix de l’énergie et de leur volatilité. Elle a aussi perturbé les échanges commerciaux, accru l’incertitude et causé de la volatilité sur les marchés financiers. Cela pèsera sur la croissance mondiale, surtout en Europe de l’Est. L’impact du conflit sur la croissance au Canada devrait être faible pour deux raisons. D’abord, nos liens économiques avec l’Ukraine et la Russie sont très limités. Et ensuite, bien que la guerre ait globalement réduit la croissance mondiale, elle a fait augmenter la demande pour les produits de base que nous produisons et exportons – comme le pétrole, la potasse et le blé – et gonfler leur prix.

Nous avons longuement discuté de l’incidence de l’inflation plus élevée sur les Canadiens et leurs attentes d’inflation. La population s’attend de plus en plus à ce que l’inflation reste élevée pendant plus longtemps. Mais, elle anticipe encore une baisse de l’inflation, et ses attentes d’inflation à long terme restent ancrées à la cible de 2 %.

Enfin, nous avons parlé de l’impact du relèvement de notre taux directeur. Même si nous avons indiqué clairement que les Canadiens devraient s’attendre à une trajectoire à la hausse des taux d’intérêt, il peut être inquiétant de voir ses versements hypothécaires et ses autres coûts d’emprunt augmenter. Nous évaluerons attentivement les effets des taux d’intérêt plus élevés sur l’économie.

Nous nous sommes aussi demandé jusqu’où les taux pourraient et devraient monter. Je sais que beaucoup de nos concitoyens se posent la même question. Voici donc les réflexions du Conseil de direction à ce sujet.

Les Canadiens devraient s’attendre à ce que les taux d’intérêt continuent d’augmenter pour revenir vers des niveaux plus normaux. Par « normaux », on entend la fourchette que nous envisageons pour un taux d’intérêt neutre qui ne stimule pas l’économie et ne pèse pas sur celle-ci. On ne peut pas mesurer directement le taux neutre. Il faut l’estimer. Et notre estimation se situe entre 2 et 3 %. Aujourd’hui, nous avons relevé le taux directeur pour le faire passer à 1 %, ce qui reste bien en deçà du taux neutre. C’est aussi inférieur au taux directeur en vigueur avant la pandémie, qui s’établissait à 1,75 %.

Il faut se rappeler que nous avons une cible d’inflation, et non une cible de taux d’intérêt. Le Conseil de direction n’est donc pas en mode « pilote automatique » vers une destination préétablie pour le taux directeur. Le niveau que le taux atteindra va dépendre de la réponse de l’économie et de l’évolution des perspectives d’inflation.

Au moment d’entrer dans cette phase de demande excédentaire, l’économie est en plein essor et l’inflation est élevée, et nous nous sommes engagés à ramener l’inflation à la cible. Si la demande réagit rapidement aux taux plus élevés et que les pressions inflationnistes se modèrent, il pourrait être approprié de cesser temporairement notre resserrement quand nous nous serons rapprochés du taux neutre, et de faire le point. En revanche, nous pourrions devoir augmenter les taux un peu au-dessus du taux neutre pendant un certain temps afin de rétablir l’équilibre entre l’offre et la demande et de ramener l’inflation à la cible.

Nous allons évidemment actualiser notre point de vue sur les perspectives de l’économie et de l’inflation à mesure que nous recevrons de nouvelles données. Et nous continuerons de faire part de nos évaluations pour que les Canadiens puissent prendre des décisions éclairées.

Pour conclure, je dirai quelques mots sur le resserrement quantitatif. Nous avons augmenté la taille de notre bilan durant la pandémie : d’abord pour aider à restaurer le fonctionnement des marchés financiers et fournir des liquidités au système financier; et ensuite pour augmenter encore la détente monétaire de manière à soutenir la reprise. En novembre dernier, nous avons cessé d’accroître la taille de notre portefeuille d’obligations du gouvernement du Canada et nous sommes entrés dans la phase de réinvestissement. Aujourd’hui, nous avons annoncé que nous amorçons la prochaine phase, soit le resserrement quantitatif. À compter du 25 avril, nous n’achèterons plus d’obligations du gouvernement du Canada pour remplacer celles qui arrivent à échéance, ce qui fera diminuer la taille de notre bilan. Cela exercera des pressions à la hausse sur les coûts d’emprunt à plus long terme, et viendra s’ajouter aux hausses du taux directeur.

Je m’arrête là-dessus. La première sous-gouverneure Rogers et moi serons heureux de répondre à vos questions.

Rapport sur la politique monétaire – Avril 2022

L’activité économique canadienne reste vigoureuse et l’emploi est robuste. La Banque projette une croissance de l’ordre de 4¼ % en 2022, puis de 3¼ % en 2023.

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