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La crédibilité des banques centrales et la normalisation de la politique monétaire

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Introduction

Je suis ravi d’être à la City et de pouvoir m’adresser à vous cet après-midi. On peut sentir sur place le pouls du système financier mondial, et il me semble un peu irrégulier.

La reprise engagée au lendemain de la Grande Récession traîne en longueur, certains pays sortant de cette période difficile plus rapidement que d’autres. Les taux d’intérêt à long terme sont extrêmement bas, bien en deçà des cibles d’inflation des banques centrales. La volatilité des marchés financiers a augmenté partout, à un moment où les économies et les politiques prennent des directions différentes et où les perspectives de normalisation de la politique monétaire se confirment de plus en plus.

J’aimerais aujourd’hui me pencher sur les conséquences de cette situation pour la crédibilité des banques centrales. C’est un sujet auquel nous devrions tous réfléchir. Les très bas taux d’intérêt à long terme et les hausses récentes de la volatilité des marchés financiers signalent-ils un effritement de la crédibilité des banques centrales? Personne ici ne sera surpris que je réponde par la négative. Les banques centrales remplissent leur fonction dans un contexte très difficile. Je m’intéresserai aujourd’hui aux enseignements à tirer de la faiblesse des taux d’intérêt et de la volatilité croissante des marchés financiers, ainsi qu’aux effets attendus de la normalisation de la politique monétaire.

Taux d’intérêt à long terme et crédibilité

Examinons d’abord les coûts d’emprunt extrêmement bas qui prédominent dans bien des économies. Prenons, par exemple, le rendement que rapporterait une obligation à dix ans émise par un État du G7 et détenue jusqu’à l’échéance. Les investisseurs accepteraient un rendement annuel inférieur à la cible d’inflation de la banque centrale - certains même, bien en deçà.

Que déduire de la propension des investisseurs à accepter des rendements aussi bas? Les banques centrales peuvent très bien adopter des cadres stratégiques différents, mais le concept de maîtrise de l’inflation est au cœur de la politique monétaire de la plupart des économies. Les bas rendements révèlent-ils qu’aux yeux des investisseurs, nous ne parviendrons pas à faire remonter l’inflation à la cible?

Pour répondre à cette question, considérons les données sur le Canada. Dans une étude récente, Bruno Feunou et Jean-Sébastien Fontaine, économistes à la Banque du Canada, ont décomposé, à l’aide d’un modèle de structure par terme, le rendement d’une obligation à dix ans du gouvernement du Canada en trois éléments : les attentes d’inflation à long terme, les attentes relatives aux taux d’intérêt réels à court terme et la prime de terme.

D’après notre analyse, les attentes d’inflation à long terme au Canada sont restées très proches de la cible de 2 % depuis les débuts de la crise financière. Cette conclusion est corroborée par d’autres méthodes à notre disposition pour mesurer les attentes d’inflation à long terme. Citons, entre autres, les enquêtes menées auprès de prévisionnistes professionnels et la méthode du taux d’inflation neutre fondée sur la comparaison entre les obligations nominales et les obligations à rendement réel.

Permettez-moi d’ouvrir ici une parenthèse sur un point essentiel. Pourquoi les attentes d’inflation sont-elles si importantes? Eh bien, c’est parce que des attentes bien ancrées aident à favoriser la stabilité de l’inflation, de la production et du système financier. Un ancrage solide des attentes d’inflation donne également aux banques centrales une plus grande marge de manœuvre pour réagir aux chocs temporaires, comme les fluctuations des prix de l’énergie ou des taux de change.

Il apparaît que, dans l’ensemble, les banques centrales ont bien réussi à ancrer les attentes dans un contexte très difficile. Il est clair dans mon esprit que, évaluée sur cette base, notre crédibilité est intacte. Mais nous ne voulons pas pour autant céder à un faux sentiment de sécurité. Il faut faire preuve de vigilance, car il peut s’avérer très ardu d’ancrer de nouveau des attentes à long terme ayant dévié de la cible.

Si notre objectif est de comprendre pourquoi les taux d’intérêt à long terme sont aussi bas, il nous faut donc examiner les deux autres composantes : les attentes relatives aux taux d’intérêt réels à court terme et la prime de terme. Ces éléments permettent en effet d’expliquer la chute des rendements des obligations à long terme depuis la crise.

Ce point a un rapport direct avec notre sujet, car les banques centrales ont largement influencé ces composantes en s’efforçant d’atteindre leurs objectifs d’inflation au lendemain de la crise.

À ce stade de ma démonstration, j’aurais quatre remarques à formuler. Premièrement, les attentes relatives aux taux d’intérêt réels à court terme dépendent du taux d’intérêt neutre réel, à savoir le taux qui crée juste assez d’épargne pour financer l’investissement à long terme. Carolyn Wilkins, première sous-gouverneure de la Banque du Canada, a prononcé un discours l’an dernier dans lequel elle expliquait pourquoi nous devrions nous attendre à un taux d’intérêt neutre réel plus bas à l’échelle du globe. Parmi les raisons invoquées, on retrouve le ralentissement de l’accroissement de la population active et de la croissance de la productivité dans les économies développées, ce qui laisse entrevoir une baisse de la demande d’investissement et une abondance de l’offre d’épargne émanant de bon nombre d’économies émergentes. Il faut donc d’ores et déjà envisager des taux d’intérêt d’équilibre à partir d’un niveau initial plus bas.

Deuxièmement, en plus de ces facteurs structurels, les banques centrales ont réagi à la crise financière et à la Grande Récession ultérieure en abaissant vigoureusement les taux directeurs. Plusieurs banques centrales, dont la Banque du Canada, se sont également trouvées aux prises avec la contrainte que leur impose la borne du zéro des taux d’intérêt. Nous sommes parvenus à faire reculer le niveau du taux directeur anticipé en donnant divers types d’indications prospectives, ce qui s’est traduit par une intensification des pressions sur les attentes relatives aux taux réels à court terme.

Troisièmement, les mesures prises par les banques centrales et les indications prospectives ont permis de réduire l’incertitude entourant les taux directeurs à court terme, ce qui a fait baisser la prime de terme.

Quatrièmement, les programmes d’assouplissement quantitatif mis en place par certaines banques centrales prévoyaient des rachats d’obligations à long terme, qui ont eu pour conséquence de diminuer les rendements de ces titres. Tout porte à croire que ces rachats ont même tiré vers le bas les rendements sur les marchés n’ayant pas eu recours à l’assouplissement quantitatif, comme le Canada.

En résumé, diverses raisons très convaincantes permettent d’expliquer la faiblesse inhabituelle des taux d’intérêt à long terme, mais le désarrimage des attentes d’inflation n’en est pas le principal déterminant. Les bas taux d’intérêt à long terme sont plutôt liés à une combinaison de facteurs : le fléchissement du taux d’intérêt neutre et les mesures prises par les banques centrales pour favoriser une croissance plus soutenue, et ainsi atteindre leurs cibles d’inflation. En somme, c’est sur la base des attentes d’inflation, et des résultats en matière d’inflation qui les sous-tendent, qu’il faudrait juger de la performance d’une banque centrale.

Volatilité des marchés financiers et crédibilité

Selon certains observateurs, toutefois, il conviendrait de juger de la crédibilité d’une banque centrale à partir d’un ensemble plus vaste de critères, y compris le degré de volatilité sur les marchés financiers. Ces derniers mois, les mesures de la volatilité se sont inscrites en hausse pour toute une gamme de catégories d’actifs et dans bon nombre de pays. C’est le cas des obligations du Trésor américain, des taux de change et de l’indice Standard & Poor’s 500, pour ne citer que quelques exemples. De nombreux facteurs contribuent à cette hausse et je n’en dresserai pas ici la liste complète. Je me contenterai d’en mentionner quatre.

Premièrement, les forces qui s’exercent sur l’économie mondiale sont puissantes et agissent différemment sur un grand nombre d’économies. Les vents contraires de l’après-crise qui soufflent sur la croissance, parmi lesquels la réduction généralisée des leviers d’endettement et l’incertitude encore présente au sujet de l’avenir, se sont avérés des plus persistants. En outre, la chute brutale des prix du pétrole a des effets notables, positifs pour certaines économies et négatifs pour d’autres. Ce choc a surpris tout le monde et s’est révélé d’une ampleur et d’une rapidité telles qu’un grand nombre d’entre nous avons dû déployer des efforts considérables pour en comprendre pleinement toutes les implications. Plusieurs banques centrales dans le monde, dont la Banque du Canada, ont réagi en annonçant des mesures de politique monétaire que les investisseurs n’avaient pas anticipées à 100 %.

Deuxièmement, ces forces induisent une orientation divergente de la politique monétaire des trois grandes banques centrales : la Banque centrale européenne et la Banque du Japon mettent en œuvre des mesures d’assouplissement quantitatif, tandis que la Réserve fédérale amorce la normalisation de sa politique monétaire. Naturellement, cette divergence entraîne un ajustement des perspectives concernant les taux d’intérêt et les monnaies, de même qu’une volatilité accrue sur les marchés des obligations et des changes.

Un troisième facteur qui contribue à la volatilité des marchés financiers a trait à la réforme réglementaire mondiale. Le dispositif de Bâle III et les autres réformes concourent manifestement à rendre le système financier international plus sûr, et c’est la priorité numéro un. Toutefois, en raison de la mise en place de ces mesures, les banques et certains courtiers sont désormais moins enclins à détenir des stocks, à agir à titre de teneurs de marché et à remplir une fonction d’amortisseur en période de forte volatilité.

Quatrièmement, l’orientation à sens unique de nos perspectives économiques a entraîné ces dernières années une réduction de la volatilité sur les marchés financiers. Au vu des capacités excédentaires dans de nombreuses économies, de la croissance durablement faible et de la menace réelle représentée par la déflation dans certaines économies, les taux d’intérêt s’annonçaient très bas pour une très longue période. Cette anticipation s’est vue renforcée par les indications prospectives et les autres mesures de politique monétaire non traditionnelles adoptées par les banques centrales. La donne est toutefois en train de changer. Bien qu’inégale et fragile, la reprise mondiale progresse, et nous approchons d’une phase de transition, c’est-à-dire que nous entamons, en quelque sorte, la première étape vers un retour à la normale.

À terme, les vents contraires qui soufflent sur le monde se dissiperont et les banques centrales seront à même de retirer progressivement leurs mesures exceptionnelles et de renouer avec des modes de conduite de la politique monétaire plus traditionnels. Il s’ensuivra du même coup un retour des risques tant à la hausse qu’à la baisse, les taux d’intérêt pouvant alors augmenter ou diminuer selon l’évolution des économies. Une volatilité financière accrue est à prévoir durant cette phase de transition.

Ces éléments me semblent des raisons légitimes de s’attendre à une plus grande volatilité sur les marchés financiers aujourd’hui. La volatilité que nous observons en ce moment est-elle anormalement élevée? Eh bien, non. La volatilité s’est certes intensifiée récemment, mais à partir de niveaux historiquement très bas. En fait, elle a entamé une remontée vers les moyennes historiques, et non vers des niveaux anormaux.

Cette hausse de la volatilité constitue-t-elle réellement une évolution négative? Encore là, la réponse est non. La volatilité est avant tout liée aux évolutions économiques inattendues auxquelles les banques centrales vont nécessairement réagir pour s’acquitter de leur mandat. En cas de choc économique, qu’il soit favorable ou défavorable, une volatilité accrue s’ensuit naturellement sur les marchés financiers et elle fait partie intégrante du processus d’équilibrage de l’économie. Cette volatilité financière n’est en soi ni bonne ni mauvaise. Et si elle témoigne de la nouvelle possibilité que les perspectives à sens unique des dernières années tendent enfin à être plus équilibrées, alors c’est clairement de bon augure.

Le retour à la normale

Quoi qu’il en soit, au moment où nous entamons le processus de retour à la normale, la question demeure : si les indications prospectives explicites permettent de contenir la volatilité des marchés financiers, pourquoi ne pas continuer d’y recourir?

J’entends ici par « indications prospectives » les déclarations explicites concernant la trajectoire future des taux d’intérêt. Les banques centrales parlent forcément de l’avenir, et toute déclaration à ce sujet peut être perçue comme un type d’indications prospectives pour les marchés. Tous ces types d’indications ont leur utilité, dans le contexte approprié. Pour ma part, je réserve le terme « indications prospectives » aux commentaires, ou aux engagements conditionnels, portant spécifiquement sur les taux d’intérêt.

Il ne fait absolument aucun doute que les indications prospectives constituent un outil précieux à la disposition des banques centrales. Elles se sont montrées incontestablement utiles au Canada et ailleurs. Toutefois, comme je l’ai expliqué dans un article publié l’an dernier, nous sommes d’avis à la Banque du Canada que les déclarations servant à orienter explicitement les attentes des marchés au sujet de la trajectoire future des taux d’intérêt doivent être réservées à des circonstances exceptionnelles, lorsque le taux directeur se situe à la borne du zéro ou que les marchés sont sous tension, par exemple. Le fait de garder les indications prospectives en réserve permet d’accroître leur portée au moment où on en fera usage. Sinon, elles créent une dépendance et perdent de leur effet. Bref, il y a un prix à payer pour l’utilisation des indications prospectives.

Permettez-moi de préciser mes propos en insistant sur certaines des idées exposées dans cet article. Les indications prospectives ont pour conséquence d’éliminer certaines des mesures envisageables par la banque centrale. Cette dernière, en s’engageant à ne pas relever les taux d’intérêt pendant une certaine période, ou jusqu’à ce que certaines conditions économiques soient réunies, peut aplanir la courbe des rendements et donner une impulsion additionnelle à l’économie. Mais en prenant cet engagement, elle se trouve en fait à proposer un pari biaisé aux investisseurs. La volatilité chute, provisoirement, les acteurs du marché déterminant alors naturellement leur position en fonction de ce pari, dans bien des cas à l’aide d’un important levier d’endettement.

Que se passe-t-il quand la conjoncture change, comme c’est inévitablement le cas? Qu’en est-il lorsque les investisseurs commencent à envisager la possibilité que la banque centrale modifie ses indications prospectives? Ces derniers dénouent les positions prises en fonction des indications de la banque centrale, et toute la volatilité contenue jusque-là resurgit tout à coup sur les marchés financiers, dépassant souvent les moyennes historiques. C’est alors que nous payons le prix des indications prospectives. Assurément, lorsque le taux directeur se trouve à la borne du zéro, les avantages qu’offrent les indications prospectives peuvent facilement surpasser les coûts. À d’autres moments, ce sont les coûts qui l’emportent.

En temps normal, c’est-à-dire lorsqu’on est clairement en présence de risques économiques et financiers tant à la hausse qu’à la baisse, une loi fondamentale de l’économie prévaut : la volatilité est inévitable. C’est une force de la nature. Les économistes parlent de « chocs » de volatilité sous-jacente. Il s’agit de variations inexpliquées de la demande de consommation ou du comportement des entreprises, de chocs des cours pétroliers, de chocs provenant d’économies étrangères et, force est de l’admettre, de chocs sur les marchés financiers. Cette volatilité doit bien se retrouver quelque part dans l’économie. Les banques centrales ciblent l’inflation et, de ce fait, stabilisent l’inflation et la croissance économique, pas les taux d’intérêt. Compte tenu de ce mandat, la volatilité naturelle qui se manifeste pèse davantage sur les marchés financiers.

Illustrons cette idée dans sa version la plus radicale en imaginant comment se comporterait une banque centrale omnisciente. Elle anticiperait tous les chocs touchant l’économie et modifierait les taux d’intérêt à la hausse et à la baisse pour contrecarrer leur effet, de sorte que l’inflation demeurerait toujours exactement à la cible. En examinant les données après coup, on pourrait penser que la volatilité des taux d’intérêt et des marchés financiers était inutile, puisque l’inflation est restée à la cible en permanence. Autrement dit, des décisions parfaites de politique monétaire pourraient sembler ridicules, simplement parce que les gens ne perçoivent pas les chocs sous-jacents. Pourtant la volatilité des marchés financiers était une conséquence naturelle des efforts déployés par la banque centrale pour remplir son mandat.

Bien sûr, nous n’avons pas connu de conjoncture normale depuis un bon moment. Nous faisons seulement nos premiers pas timides vers un retour à la normale, et la route ne sera pas toujours sans encombre, comme l’illustre bien la situation récente au Canada. À la fin de l’année dernière, des signes encourageants d’une généralisation de la reprise économique se sont manifestés. Le raffermissement des exportations avait commencé à se traduire par une hausse des investissements des entreprises. Toutefois, dans les semaines précédant notre décision relative aux taux d’intérêt en janvier, nous avons dû prendre en considération la dégringolade inattendue des cours mondiaux du pétrole. Compte tenu de l’importance du pétrole pour l’économie canadienne, ce choc représentait un risque à la baisse considérable pour notre profil d’évolution de l’inflation. Il faisait également peser un risque sur la stabilité financière en raison de la diminution des revenus qu’il impliquait. Comme des prix du pétrole plus bas impliquent des revenus moindres au Canada, le choc ferait monter le ratio de la dette au revenu des ménages canadiens, et ce, même en l’absence de tout nouvel emprunt.

En janvier, nous avons jugé qu’il valait mieux agir au plus vite, vu l’ampleur du choc et ses effets probables dans l’immédiat. En effet, les prix du pétrole reculaient encore, et atteignaient des niveaux inférieurs aux hypothèses intégrées à nos prévisions. Nous avons par conséquent pris une assurance en abaissant les taux d’intérêt de 25 points de base. La réaction à cette baisse sur l’ensemble de la courbe des rendements et sur le taux de change contribuerait à amortir le choc causé par la chute des cours pétroliers, en plus de ramener plus rapidement l’économie à son plein potentiel et l’inflation à 2 % de façon durable. Cette réaction servirait aussi à atténuer la hausse du ratio de la dette au revenu en limitant la diminution du revenu, quoique le niveau d’endettement soit susceptible d’augmenter légèrement.

Nous savions que les marchés financiers seraient surpris par notre décision en janvier, et nous préférons en général éviter les effets de surprise. Mais nous ferons ce qu’il faut pour remplir notre mandat en matière de ciblage de l’inflation.

Dans les semaines suivantes, l’inflation a reculé comme prévu et la production s’est accrue conformément à notre projection. Les conditions financières se sont assouplies et les cours du pétrole se sont stabilisés à l’intérieur d’une fourchette assez proche de notre projection de janvier. Devant ce constat, nous étions de plus en plus à l’aise avec l’étendue de l’assurance que nous avions déjà prise, d’où la décision de laisser les taux inchangés plus tôt ce mois-ci. Les effets négatifs de la baisse des prix du pétrole commencent à se faire sentir; les effets positifs prendront plus de temps à se matérialiser. Nous devons par conséquent surveiller ces forces opposées au sein de l’économie, et la baisse opérée en janvier nous a permis de gagner un peu de temps pour suivre l’évolution de la situation.

Certains ont avancé que cette décision nous plaçait sous la « dépendance des données ». Je dois avouer que je trouve l’idée un peu étrange. Les données jouent toujours un rôle crucial quand il s’agit de déterminer comment progresse l’économie. Même dans des circonstances exceptionnelles, les banques centrales ont recours à des données pour évaluer la tenue de l’économie par rapport aux attentes.

Notre économie revenant progressivement à la normale, nous continuerons de discuter avec les dirigeants d’entreprises pour connaître leur point de vue. Nous suivrons de près les données, comme toujours, et surveillerons l’évolution des chiffres par rapport à nos prévisions. Et nous attendrons des acteurs du marché qu’ils suivent les mêmes données, et se forgent leur propre opinion sur ce qu’elles signifient.

Nous nous attachons, dans nos communications, à expliquer clairement nos prévisions économiques et à faire preuve de transparence au sujet des risques pris en compte par la banque centrale. Toutes choses égales par ailleurs, cette stratégie devrait contribuer à réduire le risque d’effet de surprise pour les marchés. Il n’en demeure pas moins naturel qu’en temps normal, un effet de surprise de nature économique génère de la volatilité. Mais nous estimons préférable de voir la volatilité se refléter dans les prix sur des marchés financiers bien informés et efficients, que de la contenir artificiellement à l’aide d’indications prospectives.

Conclusion

Permettez-moi de conclure. Comme nous l’avons vu, notre détermination à poursuivre nos objectifs d’inflation a donné lieu à des attentes d’inflation bien ancrées. Celles-ci montrent que les acteurs du marché continuent de croire tout autant dans notre engagement que dans notre capacité à ramener l’inflation à la cible.

Les mesures de politique monétaire non traditionnelles ont contribué de manière déterminante, au Canada et ailleurs, à favoriser la croissance ainsi que l’atteinte de nos objectifs d’inflation. Au moment où l’économie mondiale s’affranchit de la Grande Récession et où l’époque des politiques non traditionnelles touche à sa fin, un retour à des niveaux extrêmement bas de volatilité sur les marchés financiers est peu probable. Des épisodes de volatilité accrue sont à prévoir à mesure que les investisseurs dénoueront les positions prises à la lumière des indications prospectives et que les marchés réagiront aux chocs. Dans le cadre du processus de normalisation, il s’agit là de la réaction naturelle des marchés financiers face à l’incertitude économique et d’un retour à des conditions de négociation normales, non pas d’un effritement de la crédibilité des banques centrales.

La Banque du Canada continuera de s’acquitter de son mandat en matière de ciblage de l’inflation. Elle continuera d’appliquer les politiques nécessaires pour ramener rapidement l’inflation à la cible tout en tenant compte des considérations liées à la stabilité financière. Elle effectue cette démarche dans un monde incertain où les chocs surviennent quotidiennement, où les comportements changent sans cesse et où nos outils et modèles d’analyse ne peuvent nous offrir que des règles empiriques simples. En ce sens, la conduite de la politique monétaire est une activité d’une très grande imprécision : elle relève moins de la mécanique que de la gestion des risques.

En définitive, notre crédibilité dépendra de notre capacité à remplir notre mandat sur de longues périodes. Je suis convaincu que nous continuerons de nous montrer à la hauteur de cette tâche.

Je tiens à remercier Don Coletti, Stephen Murchison, Eric Santor, Scott Kinnear et Jing Yang de l’aide qu’ils m’ont apportée dans la préparation de ce discours.

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