Introduction

Bonjour et merci aux chambres de commerce du Manitoba et au groupe The Associates de l’Asper School of Business d’appuyer cette activité et de me donner l’occasion de m’adresser à vous aujourd’hui. Je tiens aussi à tous vous remercier d’avoir bien voulu me consacrer votre pause-repas.

Je suis particulièrement heureuse d’être à Winnipeg. Je considère toujours cette ville, et le Manitoba, comme mon chez-moi. C’est ici que je suis née, que j’ai grandi, que j’ai fait mes études universitaires et que j’ai commencé ma carrière. Et j’ai encore beaucoup de membres de ma famille, d’amis et d’anciens collègues qui habitent la province, donc c’est un peu comme retourner à la maison.

Hier, c’était la Journée internationale des femmes, et j’ai eu l’occasion de rencontrer un groupe de leaders inspirantes venant des quatre coins de la province. Aujourd’hui, j’ai hâte d’entendre ce que vous avez à dire.

La Banque sonde régulièrement les consommateurs et les entreprises du pays dans le cadre de ses fonctions. Mais il est très important pour nous de vous entendre dire directement comment vos communautés et vos entreprises composent avec les décisions économiques au jour le jour. Nous savons que les décisions que nous prenons ont une réelle incidence sur les gens.

Je compte bien vous parler de la décision annoncée par la Banque hier de maintenir les taux d’intérêt à leur niveau, et vous faire part des discussions que nous avons eues avant de prendre cette décision. Mais d’abord, j’aimerais vous mettre en contexte. J’aborderai l’inflation en premier, étant donné que c’est ce que nous ciblons. Nous pouvons tous convenir qu’elle demeure trop élevée. L’inflation a commencé à reculer, mais à 5,9 %, nous avons encore du chemin à faire pour la ramener à la cible de 2 %.

Notre politique monétaire contribue à faire fléchir l’inflation. Les hausses du taux directeur commencent à ralentir la demande, en donnant à l’offre le temps de rattraper son retard et en réduisant une partie des pressions sur les prix.

Nous sommes conscients qu’il a été difficile pour une grande partie de la population canadienne de s’adapter à des taux d’intérêt plus élevés. Le taux directeur a atteint des niveaux qu’on n’avait pas vus depuis 15 ans. Nous savons aussi que bon nombre de Canadiens et de Canadiennes se demandent comment la hausse des taux hypothécaires qui les touche alors qu’ils doivent composer avec des factures d’épicerie plus chères qu’auparavant va ultimement freiner l’inflation et leur faciliter la vie.

On nous demande aussi fréquemment comment l’augmentation des taux d’intérêt nous permettra de combattre l’inflation s’il s’agit principalement d’un phénomène mondial. Étant donné que ce sont de grandes forces mondiales, à savoir la flambée des prix des produits de base et les perturbations importantes des chaînes d’approvisionnement, qui ont en premier lieu provoqué la montée de l’inflation, que peut réellement faire la Banque pour remédier à la situation?

Ce sont là de bonnes questions, et je vais faire de mon mieux pour y répondre aujourd’hui.

Je vais expliquer comment la forte inflation au Canada tient en grande partie de facteurs mondiaux qui ont fait augmenter les prix de nombreux produits de base et d’autres biens.

Ensuite, j’aborderai la manière dont les pressions inflationnistes se sont propagées au pays en raison de la forte demande intérieure, ou autrement dit, de la surchauffe de l’économie. Les relèvements de taux d’intérêt visent à corriger cette situation.

Après, je ferai un survol de ce qui se passe à l’échelle mondiale et au pays pour mettre les choses en perspective.

Enfin, comme je l’ai mentionné, je vais vous expliquer ce qui nous a amenés à prendre la décision annoncée hier.

Comment la forte inflation s’est installée au Canada

Les forces mondiales

Il ne fait aucun doute que l’un des plus gros moteurs de l’inflation élevée à l’échelle du globe a été la montée des prix des produits de base. Lorsque la pandémie de COVID-19 a frappé et que l’économie mondiale s’est brusquement retrouvée à l’arrêt, les prix de nombreux produits de base ont chuté, ceux du pétrole en particulier, mais aussi ceux du gaz naturel, du bois d’œuvre et du cuivre. Certains secteurs de l’économie, comme celui de l’immobilier, se sont tout de même remis rapidement. Donc, la demande de certains produits connexes, tels que le bois d’œuvre, a très vite rebondi. Ensuite, lorsque les économies ont commencé à rouvrir, la demande et les prix d’autres produits de base, dont le pétrole et le gaz naturel, se sont aussi redressés rapidement.

Au début de 2022, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a perturbé davantage l’économie mondiale. Le Canada est le pays qui a la deuxième plus importante diaspora ukrainienne au monde, et le Manitoba est la province qui a le plus d’Ukraino-Canadiens. Donc, je sais que les conséquences humaines de cette guerre insensée se sont fait sentir ici. Les répercussions économiques ont également été profondes et désastreuses. Au milieu de l’année dernière, les prix mondiaux des produits de base, notamment ceux du pétrole, du gaz naturel et du blé, avaient grimpé à des niveaux inégalés depuis 2008, soit juste avant la crise financière mondiale.

Il n’a pas fallu longtemps avant que la population canadienne en ressente les effets. Les prix de l’essence se sont envolés et ont largement dépassé 2 $ le litre l’été dernier. Et comme les produits de base servent d’intrants clés pour de nombreux produits, les effets sur les prix se sont généralisés. Le renchérissement de l’énergie a fait augmenter les coûts d’exploitation de presque toutes les entreprises. Il a aussi fait grimper les coûts d’expédition des biens aux clients. Et les prix des aliments ont monté en flèche. La guerre en Ukraine a eu une incidence sur les prix des céréales et des engrais. Des phénomènes météorologiques ailleurs dans le monde ont nui à de nombreuses récoltes. Et une maladie a limité l’offre de volaille et d’œufs. L’ensemble de ces facteurs s’est répercuté sur les prix dans les épiceries canadiennes au milieu de l’année dernière.

L’autre grande force derrière l’inflation élevée dans le monde entier est une combinaison des perturbations dans les chaînes d’approvisionnement mondiales et d’une hausse prononcée de la demande de biens durables.

Comme bien des gens partout dans le monde, bon nombre de Canadiens et de Canadiennes ont apporté des améliorations à leur logement durant la pandémie en se procurant notamment de nouveaux meubles et électroménagers et de nouvelles technologies. Dans l’impossibilité de dépenser pour des services, comme un voyage ou encore un repas au restaurant, les gens d’ici et d’ailleurs se sont rabattus sur les biens. Au même moment, les confinements créaient de graves problèmes dans les chaînes d’approvisionnement mondiales, qui sont fortement intégrées. Les usines étaient fermées, les matières premières se faisaient rares et les retards d’expédition s’accumulaient. Résultat : une flambée des prix d’une vaste gamme de biens.

La demande intérieure

Ces trois forces inflationnistes mondiales – la hausse soudaine des prix des produits de base, l’emballement de la demande mondiale de biens et les problèmes dans les chaînes d’approvisionnement – se sont ensuite combinées à un quatrième élément ici : la surchauffe de l’économie canadienne.

À ce temps-ci l’an dernier, le Canada sortait de la vague liée au variant omicron et de ce qui pourrait être le dernier confinement. L’économie du pays a fortement gagné en résilience durant la pandémie, résistant mieux à chacun des confinements. La population canadienne avait hâte de rattraper le temps perdu, notamment de voyager et de manger au restaurant, certaines dépenses en services ont donc repris le pas sur celles en biens.

Même si les entreprises canadiennes se sont montrées remarquablement résilientes en s’adaptant à de multiples confinements, plus d’une a eu du mal à garder le rythme face au raffermissement de la demande. Les problèmes d’approvisionnement persistaient, et le personnel qui avait quitté son emploi ou été mis à pied durant la pandémie devait être embauché et formé de nouveau ou remplacé. L’enquête sur les perspectives des entreprises que nous avions menée au premier trimestre de 2022 indiquait que quatre entreprises sur cinq auraient des difficultés à faire face à une recrudescence de la demande – une proportion record1.

Cette pression s’est répercutée de façon très claire sur le marché du travail. Le nombre de postes vacants a bondi, doublant presque par rapport au niveau prépandémique, ce qui est un signe évident de pénuries généralisées de main-d’œuvre. La main d’œuvre représente un coût important pour les entreprises, surtout dans le secteur des services. Ces pénuries, jumelées à l’accroissement de la demande de services, ont exercé des pressions à la hausse sur les prix des services.

Et, à la faveur du renforcement de la demande, de nombreuses entreprises ont commencé à répercuter leurs coûts plus élevés sur leurs clients. Les hausses de prix étaient plus importantes et plus fréquentes qu’en temps normal.

Maîtriser à nouveau l’inflation

Voilà comment des forces mondiales et nationales se sont combinées pour que l’inflation atteigne des sommets jamais vus depuis 40 ans au Canada. Mais tout comme l’inflation a augmenté aux quatre coins du globe, on se rend compte maintenant qu’elle recule de manière assez constante.

Par ailleurs, tout comme ils ont été un facteur important dans la montée de l’inflation, les prix des produits de base ont joué jusqu’à présent un rôle clé dans sa baisse. Les cours du pétrole ont fléchi d’environ 35 % depuis l’été dernier, surtout en raison de l’amélioration des perspectives entourant l’offre. Plus récemment, les prix du gaz naturel ont aussi chuté rapidement – d’environ 60 % depuis l’automne – essentiellement parce que l’hiver a été plus chaud que d’habitude dans l’hémisphère Nord. Les prix des produits forestiers et agricoles, de même que ceux des métaux, se sont aussi repliés. La diminution des prix de l’énergie, en particulier, s’est traduite par une réduction des frais de transport international et du coût des intrants.

Les chaînes d’approvisionnement mondiales sont également en voie d’amélioration. Il y a moins de ces goulots d’étranglement qui faisaient en sorte que l’offre mondiale de produits de base et d’autres biens avait tant de mal à suivre le rythme de la demande. De fait, les frais de transport et les délais de livraison se rapprochent maintenant des niveaux observés avant la pandémie.

De plus, la politique monétaire remplit ses objectifs. Des banques centrales du monde entier ont resserré leur politique monétaire en augmentant les taux d’intérêt, ce qui a contenu certains des moteurs nationaux de l’inflation dans différents pays. Résultat : la progression de la demande mondiale a ralenti dans son ensemble, surtout s’agissant des biens durables.

La Banque du Canada ne fait pas exception. Nous avons relevé le taux directeur huit fois de suite depuis mars 2022. Les taux d’intérêt plus élevés au pays commencent à ralentir la croissance des dépenses des ménages, en particulier dans les secteurs sensibles aux taux d’intérêt. Et, globalement, les taux plus élevés contribuent à rééquilibrer la demande et l’offre2.

Cela dit, nous n’avons observé jusqu’à présent que des signes modérés de détente parmi toute la gamme d’indicateurs du marché du travail que nous suivons. Le nombre de postes vacants a légèrement diminué, mais est encore important, le taux de chômage est proche des creux historiques et de nombreuses entreprises continuent de faire état de pénuries de main-d’œuvre.

Alors, qu’est-ce que cela veut dire en termes d’inflation? Eh bien, comme je l’ai dit au début, l’inflation est passée d’un sommet de plus de 8 % atteint cet été à 5,9 % en janvier. C’est un chiffre encore trop élevé, mais selon notre projection la plus récente parue en janvier, l’inflation devrait descendre, de manière relativement constante, à environ 3 % au milieu de l’année et atteindre la cible de 2 % l’an prochain3.

L’évolution de l’inflation au Canada a, jusqu’à maintenant, quelque chose de symétrique : des facteurs tant mondiaux que nationaux se sont combinés pour faire monter l’inflation, et ils devront se replier davantage pour que celle-ci revienne à la cible de 2 %.

L’expérience du Canada par rapport aux autres pays

Depuis le début, j’ai beaucoup parlé des points communs entre l’expérience du Canada et celle d’autres pays. Mais on relève aussi certaines différences. Permettez-moi donc de comparer, pendant un instant, notre situation à celle d’autres pays dans quelques domaines4.

Pour commencer, notre taux d’inflation actuel, bien qu’encore trop élevé, est le deuxième plus faible des pays du G75. Ce taux est plus bas au Japon, où il atteint 4 %. Et la cadence de l’inflation, qui est mesurée par le taux de variation des prix au cours des trois derniers mois, est aussi l’une des moins hautes parmi les pays du G7. Il convient aussi de noter que l’inflation des prix des services s’est stabilisée au Canada ces derniers mois, tandis qu’elle a continué d’augmenter dans d’autres pays. Naturellement, ces classements pourraient évoluer un peu dans les mois à venir. Mais ce sont tous des classements où il vaut mieux figurer près du bas.

Examinons maintenant la tenue de l’économie : le Canada a enregistré la plus forte croissance du produit intérieur brut (PIB) parmi les pays du G7 depuis que le cycle de resserrement a commencé, au début de l’an dernier. Et le Fonds monétaire international s’attend à ce que le Canada affiche la plus forte croissance moyenne du PIB parmi les pays du G7 en 2023 et 20246. C’est une bonne nouvelle, qui rappelle aussi à quel point les effets de nos hausses du taux directeur doivent encore se propager dans l’économie, de telle sorte que la demande se modère suffisamment et que l’offre puisse rattraper son retard.

La croissance de l’emploi au Canada a également été forte, comparativement à la plupart des pays du G7. Notre pays arrive au second rang en ce qui concerne la reprise de l’emploi et la remontée du nombre d’heures travaillées depuis le début de la pandémie. C’est aussi chez nous qu’a été observée la croissance la plus rapide de la population adulte, qui tient à l’immigration. En outre, nous avons le plus haut taux d’activité des femmes de tous les pays du G7, grâce entre autres à des services de garde plus abordables et aux modalités de travail flexibles. Une offre de main-d’œuvre plus importante est une bonne chose, car cela signifie généralement que l’économie peut croître davantage avec moins de pressions inflationnistes.

Toutefois, nous continuons d’avoir l’un des taux de croissance de la productivité les plus bas parmi les pays du G7. L’accroissement de la productivité est bénéfique pour l’économie, parce qu’il permet aux entreprises de verser de plus hauts salaires. Si nous continuons d’avoir une croissance des salaires supérieure à la moyenne comme celle qui a été observée au pays sans que la croissance de la productivité décolle vraiment, il sera difficile de ramener l’inflation jusqu’à 2 %.

Les ménages canadiens sont parmi les plus endettés de ceux des pays du G7 : notre ratio de la dette au revenu des ménages a suivi une trajectoire généralement ascendante au cours des trois dernières décennies. Un endettement élevé rend généralement une économie plus sensible aux hausses de taux d’intérêt.

En matière de politique monétaire, le Canada a eu l’un des cycles de resserrement monétaire les plus vigoureux. Nous avons été la deuxième grande banque centrale au sein des économies avancées à relever les taux d’intérêt pour combattre l’inflation. Et la hausse totale de notre taux directeur, soit 425 points de base, n’a été dépassée que par celle de la Réserve fédérale américaine, avec 450 points de base. La Banque du Canada a aussi été la première à mettre fin à son assouplissement quantitatif. De plus, depuis que nous avons entrepris notre resserrement quantitatif, le bilan de la Banque s’est contracté le plus rapidement – de plus de 20 % –, complétant ainsi la posture restrictive de notre taux directeur.

À mesure que les pressions inflationnistes mondiales vont continuer de se relâcher, chaque pays va devoir tracer son propre chemin pour revenir à la stabilité des prix. Le Canada, comme les autres pays, a un contexte qui lui est propre et qui influera sur la trajectoire de l’économie et de l’inflation. Mais c’est l’avantage d’une politique monétaire indépendante : nous pouvons revenir à notre cible d’inflation de 2 % d’une manière qui nous convienne, tout comme les autres banques centrales le font en fonction de leur propre contexte7.

Laissez-moi maintenant vous parler de notre décision concernant le taux d’intérêt annoncée hier, et des façons dont ces facteurs, ainsi que d’autres, ont motivé la décision du Conseil de direction.

Notre décision d’hier

Comme je viens de le mentionner, nous avions déjà relevé le taux directeur avec force pour combattre l’inflation élevée.

Notre resserrement monétaire a été énergique d’entrée de jeu. En effet, nous avons pris beaucoup de mesures en moins d’un an. Par conséquent, nous avons dit en janvier que nous nous attendions à faire une pause pour en évaluer les répercussions.

Hier, nous avons décidé de maintenir le taux directeur à 4,50 % et de poursuivre notre politique de resserrement quantitatif.

Mais cette pause est conditionnelle. Si l’évolution de l’économie est conforme à nos prévisions et que l’inflation diminue aussi vite que postulé dans le Rapport sur la politique monétaire de janvier, nous ne devrions pas avoir à procéder à de nouvelles hausses. Cependant, si des données montrant que l’inflation ne baisse pas comme attendu s’accumulent, nous sommes prêts à en faire plus.

Le Conseil de direction dresse un bilan contrasté à partir des données parues depuis janvier. Cela dit, l’économie évolue généralement en phase avec nos perspectives.

Il faudra avoir davantage d’éléments probants pour évaluer pleinement si la politique monétaire est assez restrictive pour ramener l’inflation à 2 %. Pour l’instant, laissez-moi vous parler des évolutions récentes et vous donner un aperçu des délibérations qui ont mené à la décision d’hier et de l’orientation de nos réflexions à l’avenir.

Je vais commencer avec l’activité économique. Au quatrième trimestre de 2022, la croissance a ralenti plus que prévu, et s’est avérée nulle. Avec la consommation, les dépenses publiques et les exportations nettes toutes en hausse, le produit intérieur brut plus faible qu’anticipé s’explique en grande partie par un ralentissement substantiel des investissements en stocks. Les données montrent qu’en général, les coûts d’emprunt plus élevés continuent de peser sur les secteurs sensibles aux taux d’intérêt, dont le logement. Elles indiquent également que les investissements des entreprises se sont affaiblis de pair avec le ralentissement de la demande intérieure et étrangère.

Dans nos délibérations, nous avons beaucoup parlé du marché du travail. La création d’emplois au Canada a été d’une vigueur surprenante ces derniers mois, et le marché est encore marqué par de vives tensions. Compte tenu de la faible croissance attendue dans les prochains trimestres, ces tensions devraient toutefois s’alléger, réduisant ainsi les pressions sur les salaires. J’ai dit plus tôt que si la forte croissance des salaires ne s’accompagne pas d’une forte croissance de la productivité, il sera difficile de ramener l’inflation à 2 %. Eh bien, les données de la semaine dernière montrent que la productivité de la main-d’œuvre au Canada a reculé pour un troisième trimestre d’affilée. Elle ne va donc pas encore dans la bonne direction.

Nous avons convenu que l’inflation est en train de baisser essentiellement comme prévu et qu’il y a eu un changement manifeste dans la dynamique des prix des biens. Mais nous nous sommes aussi entendus sur le fait que l’inflation des prix des services doit se remettre à diminuer, c’est-à-dire que le niveau auquel elle s’est stabilisée est encore trop élevé. Il faudra également que les entreprises reprennent des pratiques de fixation des prix plus normales. Les taux d’inflation fondamentale sur un an et sur trois mois vont devoir baisser davantage pour que l’inflation retourne et reste à 2 %, et il en va de même pour les attentes d’inflation à court terme.

Je me suis un peu attardée sur le contexte mondial plus tôt. Laissez-moi à présent vous en dire plus sur les discussions que nous avons eues à ce sujet. Nous avons noté qu’aux États-Unis et en Europe, les perspectives de croissance et d’inflation à court terme sont maintenant relativement plus élevées qu’attendu en janvier; en particulier, les marchés du travail restent tendus et l’inflation fondamentale est encore élevée. Étant donné que les États-Unis et l’Europe sont les principaux partenaires commerciaux du Canada, les pressions inflationnistes pourraient s’intensifier quelque peu au pays. Nous avons aussi constaté qu’un des principaux risques entourant notre projection – une augmentation des prix mondiaux de l’énergie – ne s’est pas encore matérialisé. Mais, comme prévu, l’économie chinoise est en train de rebondir à la suite de sa réouverture. La vigueur de la reprise en Chine et les répercussions de la guerre que la Russie mène à l’Ukraine demeurent d’importantes sources de risques à la hausse pour les prix des produits de base, y compris ceux de l’énergie.

Et puisque l’inflation est encore bien au-dessus de notre cible, nous restons plus préoccupés par les risques à la hausse que par ceux à la baisse.

Nous en aurons plus à dire sur le sujet dans les prévisions que nous publierons en avril.

Conclusion

J’espère vous avoir bien expliqué comment des facteurs mondiaux ont influé sur la croissance des prix au Canada et comment ils continueront d’influer sur l’inflation à l’avenir. Les grandes économies de la planète sont fortement interconnectées – mais même si nous pensons toujours mondialement, nous devons agir localement. Nous devons adapter notre politique au contexte canadien. Et la politique monétaire doit être prospective.

Nous suivons la situation de près pour voir comment elle évolue. Et nous sommes déterminés à ramener l’inflation à 2 %, pour que tout le monde puisse à nouveau compter sur une inflation basse, stable et prévisible, ainsi que sur une croissance économique durable.

Merci de votre attention.

J’aimerais remercier Subrata Sarker et Fares Bounajm de l’aide qu’ils m’ont apportée dans la préparation de ce discours.

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  1. 1. Banque du Canada (2022), Enquête sur les perspectives des entreprises – Premier trimestre de 2022.[]
  2. 2. Pour une analyse détaillée de la façon dont les taux d’intérêt plus élevés parviennent à modérer la demande et à faire baisser l’inflation, voir T. Macklem (2023), La politique monétaire en action, discours prononcé devant CFA Québec, Québec, 7 février.[]
  3. 3. Banque du Canada (2023), « L’économie canadienne », Rapport sur la politique monétaire, janvier, p. 26-27.[]
  4. 4. Toutes les données ayant servi aux comparaisons internationales proviennent soit de l’Organisation de coopération et de développement économiques, soit de sources nationales (auquel cas, les données ont été recueillies par l’intermédiaire de Haver Analytics ou de Bloomberg).[]
  5. 5. Le G7 regroupe le Canada, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Japon, le Royaume-Uni et les États-Unis, en plus de l’Union européenne. La comparaison des taux d’inflation se fonde sur la variation de l’indice des prix à la consommation global dans chacun des pays ou régions concernés.[]
  6. 6. Fonds monétaire international (2023), Mise à jour des perspectives de l’économie mondiale : Inflation au sommet et croissance en berne, Washington, janvier.[]
  7. 7. Voir P. Beaudry (2023), Sans l’ombre d’un doute : pourquoi la Banque est déterminée à ramener l’inflation à 2 %, discours prononcé devant l’École de commerce de l’Université de l’Alberta, Edmonton, 16 février.[]