Le gouverneur Tiff Macklem explique comment le ciblage de l’inflation est devenu une stratégie de premier plan des banques centrales pour maintenir la stabilité des prix. Il parle également des changements structurels à venir, des transformations du commerce international et de la façon de nous assurer que la politique monétaire est adaptée à l’avenir.

Les débuts du ciblage de l’inflation

Après la Seconde Guerre mondiale, les banques centrales du monde entier ont essayé différentes stratégies pour maîtriser l’inflation. Mais les pressions inflationnistes mondiales ont continué de s’intensifier. Puis, quand les prix du pétrole ont bondi dans les années 1970 après des réductions substantielles de la production, l’inflation a monté en flèche dans de nombreux pays.

Pour contrer l’essor des prix, le Canada et d’autres pays ont essayé de plafonner les hausses de salaires et de prix. Mais dès que ces mesures de contrôle ont été levées, l’inflation a rebondi. Certains pays ont tenté de la maîtriser en freinant la croissance de la masse monétaire. Cette méthode a aussi échoué, et l’inflation a continué d’augmenter.

Les banques centrales devaient trouver un moyen de maîtriser l’inflation qui serait :

  • simple, c’est-à-dire relativement facile à mettre en œuvre et facile à comprendre pour le public
  • flexible, c’est-à-dire capable de fonctionner dans diverses conditions au pays et à l’étranger
  • durable tout en permettant aux prix de s’ajuster à l’offre et à la demande

Le ciblage de l’inflation était à la hauteur de la tâche. Depuis que le Canada a mis en place ce régime, au début des années 1990, l’inflation est restée près de la cible de 2 % la plupart du temps. La flambée postpandémique des prix a mis ce cadre à l’épreuve comme jamais auparavant. Mais il a fonctionné, et la Banque du Canada a ramené l’inflation à la cible sans provoquer de récession.

D’autres chocs et changements sont à venir

Le monde change. Certaines des tendances qui ont soutenu la croissance économique mondiale au cours des dernières décennies – comme la démographie favorable et la mondialisation – sont en train de ralentir ou de s’inverser. On s’attend à ce que les chocs d’offre deviennent plus fréquents. Dans ce cas, l’inflation pourrait devenir plus volatile. Les changements radicaux de la politique commerciale américaine et l’imposition de nouveaux droits de douane élevés ont aussi accru l’incertitude. Les chaînes d’approvisionnement mondiales évoluent à mesure que les entreprises du monde entier cherchent de nouveaux fournisseurs et de nouvelles voies d’échange, et tentent de se tailler une place sur de nouveaux marchés.

La politique monétaire ne peut pas régler le conflit commercial. Elle ne peut pas non plus changer le fait que des changements structurels s’opèrent et que les chocs d’offre seront plus fréquents. Mais les banques centrales peuvent s’adapter à ces nouvelles réalités.

À la Banque, nous nous adaptons de différentes façons, notamment :

  • en augmentant notre utilisation de données non traditionnelles et d’enquêtes en complément des données traditionnelles auxquelles nous avons toujours eu recours
  • en accroissant nos activités de rayonnement– nous rencontrons des entreprises et des collectivités d’un bout à l’autre du Canada pour mieux comprendre l’incidence de la conjoncture économique sur leurs régions et leurs industries
  • en améliorant les modèles que nous utilisons pour nos projections
  • en utilisant des scénarios pour mieux comprendre comment différentes variables, comme les taux de droits de douane, pourraient influer sur notre économie

Ces ajustements nous donnent un portrait plus complet de l’économie. Nous pouvons ainsi prendre de meilleures décisions de politique monétaire.

Pour être prêtes à faire face à plus de changements structurels et de volatilité, les banques centrales doivent réduire l’incertitude lorsqu’elles le peuvent, et à tout le moins la gérer. »

Assurer l’avenir de notre régime de ciblage de l’inflation

Le régime de ciblage de l’inflation du Canada a bien fonctionné au cours des dernières décennies. Mais nous devons revoir notre cadre à intervalles de quelques années pour nous assurer qu’il est adapté à l’avenir. Le prochain renouvellement aura lieu en 2026, et l’examen est en cours.

Comme nous nous attendons à plus de chocs et d’incertitude dans l’avenir, nous nous posons trois grandes questions :

  • Comment pouvons-nous utiliser au mieux la flexibilité inhérente au cadre lorsque nous sommes confrontés à des chocs d’offre?
  • Comment devrions-nous mesurer l’inflation fondamentale et l’utiliser pour éclairer nos décisions de politique monétaire?
  • Quelle est l’incidence de la politique monétaire sur le secteur du logement, et comment devrions-nous intégrer l’abordabilité du logement dans notre objectif de stabilité globale des prix?

L’une des questions que nous ne nous posons pas dans le cadre de l’examen du régime est de savoir si le taux de 2 % est la bonne cible pour l’inflation. Notre cible a fait ses preuves en permettant de maintenir l’inflation à un niveau bas et stable au fil du temps.

Comme le monde est plus incertain et imprévisible, ce n’est pas le moment de remettre la cible en question. »

Sur cette page
Table des matières